08 : Auto-analyse
16/11/2010
Témoignages > Bipolarité > Ma dépression
Cette analyse est je lʼespère, celle qui clôturera le récit entamé il y a deux ans concernant ma dépression, et peut-être par lâ-même me permettra de tirer un trait final sur tout cela. Jʼaborde ici la partie la plus difficile de mon récit. Dʼune part parce que je redoute que cela ne mʼaide finalement pas, ce qui est fort probable. Mais aussi et surtout car je crains de ne pas réussir â structurer mes idées, â poser de mots sur mes ressentis, â sortir ce qui me soulagerait vraiment. Faire quelque chose dont je puisse dire en le relisant: ? Cʼétait tout â fait ça, je nʼaurais pas mieux expliqué les choses autrement ? me paraît assez illusoire. Mais nous connaissons tous le proverbe: qui ne tente rien nʼa rien. Je vais donc tenter dʼaborder tout cela de la façon la plus naturelle possible, en essayant tout de même de garder une certaine structure pour ne pas me perdre dans mes pensées au bout de deux lignes. Mais je partirai certainement dans certaines directions pour ensuite y revenir plus tard, le tout étant de toute façon très lié.
Je ne compte pas parler ici des symptômes physiques ou psychosomatiques qui me touchent, mais uniquement des perturbations mentales dont je souffre dans des moments de grand désespoir. Ma dépression sʼest accompagnée dʼune grande fatigue et dʼune activité générale très ralentie, mais je vais rester ici dans le strict cadre de, pourrait-on dire ce qui ? me passe par la tête ?, et qui est déjâ énorme.
Parlons pour commencer de ce qui a tout déclenché dans ma tête et qui est le symptôme le plus récurrent de ma dépression encore aujourdʼhui: â savoir les ? blocages mentaux ? que je subis. Jʼentends par lâ un événement ne durant majoritairement pas plus de quelques secondes sur lequel ma mémoire bute, et qui peut mʼarriver nʼimporte quand. Quelque chose qui vient â lʼinstant de me causer un traumatisme, entraînant des angoisses, des peurs, des ruminations relatives â cela et â bien dʼautres choses le plus souvent. Cʼest bien comme cela que je pourrait le définir: un traumatisme. Mais pas de ceux justifiés et dʼune réelle gravité qui vous empêchent de dormir.
Pour ma part, cela peut porter sur absolument tout et nʼimporte quoi: simples gestes, paroles adressées, ou encore brèves pensées qui font partie du quotidien et dont ni moi ni personne ne prête attention habituellement. Cependant, ces évènements ont tous un point commun: ils me mettent mal â lʼaise, et de façon subite. Ils me laissent le sentiment dʼun acte que je nʼassume pas, quʼune partie de moi ne tolère pas. Je pourrais prendre pour expliciter les choses le sentiment que chacun peut ressentir â un moment ou â un autre: celui de la gêne. Sans parler de honte pour le moment, restons-en â une simple gêne. Un petit événement ponctuel qui nous met mal â lʼaise vis-â-vis des gens qui nous entourent â cet instant précis, et duquel on se dit le plus souvent: ? Merde, ils ont dû me prendre pour un... ?, le reste étant souvent suivi dʼun qualificatif dépréciatif, quel quʼil soit. Il nous met mal â lʼaise dans lʼinstant, dʼune part parce quʼil permet aux autres de porter un certain ? mauvais jugement ? â notre égard, mais aussi et surtout parce quʼil nous renvoie â notre propre intégrité. De fait, lʼattention que nous portent les autres dans ces moments est en réalité souvent bien plus dérisoire que ce quʼon ne sʼen laisse convaincre soi-même.
Dans mon cas, on peut même totalement ignorer cette particularité du sentiment de gêne, pour la simple et bonne raison que les blocages qui mʼassaillent se déroulent le plus souvent dans des moments ou situations où je me trouve seul. La gêne renvoie donc uniquement â lʼestime que jʼai de moi-même. En temps normal, cette gêne nʼexiste pas. Ou alors, elle est si brève quʼelle nʼa même pas le temps de me déranger plus dʼun quart de seconde. Mais dans le cas des blocages, elle est bel et bien réelle et me pose de vrais soucis. Je dirais même quʼelle prend le dessus sur tout le reste.