Spectre de lʼHumeur de Cassano et Frank
30/10/2010
Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Spectre bipolaire : dépistage
Dépression et trouble de lʼhumeur, la même chose ?
Il y a encore des psychiatres et des experts qui pensent que la dépression et la bipolarité sont des troubles séparés ; d’autres vont plus loin du côté opposé et les considèrent comme des spectres cliniques qui se chevauchent en incluant également les spectres des anxiétés et des psychoses.
C’est le Prof. Giovanni Cassano qui s’est penché sur cette question en présentant les résultats du "Spectrum Project", énorme projet sur les spectres cliniques en psychiatrie. Huit spectres ont été développés pour évaluer les dérèglements de l’humeur (spectre de dépression / spectre de manie ? hypomanie), la panique, les obsessions compulsions, l’anxiété sociale, les troubles alimentaires, les troubles psychotiques, les troubles d’abus de substances. Pour chaque spectre, un questionnaire et une interview ont été élaborés.
Un "spectre" clinique inclut les symptômes typiques, les symptômes associés, les symptômes atypiques, les comportements (styles de vie) et les caractéristiques interpersonnelles.
Lʼétude de Cassano
Ce travail de Cassano (Italie) et de l’équipe de Pittsburgh (Frank et al, 2004) est en faveur de la continuité entre les signes et les épisodes (hypo)maniaques et dépressifs (voir la figure).
Cependant, le fait de montrer des liens entre les signes maniaques et dépressifs ne signifie pas nécessairement une continuité. Dans la bipolarité, les signes dépressifs (en nombre et sévérité) sont liés aux signes hypomaniaques. Le seul problème de cette étude est dans la définition des groupes : qui sont les dépressifs unipolaires ? A-t-on rechercher la cyclothymie ?
L’étude a comparé 117 adultes avec une dépression UP récurrente (sans notion d’épisodes d’hypomanie) avec 106 patients avec un trouble bipolaire type I (ces 2 groupes sont sélectionnés d’une large étude italienne). Comme prévu, le groupe BP-I présentait sur la vie entière plus de symptômes (hypo)maniaques. Toutefois, on a observé que 12 symptômes (hypo)maniaques étaient présents au moins chez 40% du groupe dépressif récurrent.

Les patients avec un nombre élevé de symptômes (hypo)maniaques présentaient aussi une nombre plus élevé de symptômes dépressifs (et vice-versa), une corrélation qui s’applique pour les 2 groupes de patients. Dans le groupe UP, la présence de chaque item (hypo)maniaque augmentait de 4,2% la probabilité d’avoir des idées suicidaires. Donc, pour les 10 items (hypo)maniaques, on totalise un risque de 42% d’augmentation des pensées suicidaires.
De plus, l’âge de début de la première dépression est plus précoce en cas de présence de symptômes (hypo)maniaques.
Ces données ont poussé les auteurs, comme Cassano et Frank, de penser à une vision de continuum du spectre clinique des dérèglements thymiques. Une attention particulière doit ainsi être faite au sujet de la présence des manifestations hypomaniaques survenant dans la dépression UP récurrente.
On retient des résultats certaines implications comme :
Malgré les limites de ce type d’approche basée uniquement sur les spectres symptomatiques (en négligeant d’autres éléments importants comme l’âge de début, la marche de la maladie, les tempéraments, l’histoire familiale,...), les données apportent certaines implications importantes dans la pratique. L’idéal serait de confronter les résultats issus de cette recherche avec les acquis des experts dans le domaine de la bipolarité.
