Le diagnostic, cest fantastique
1/01/2009
Témoignages > Information-Psychoéducation-Découverte du diagnostic
Je suis malaaaaaadeuh, complètement malaaaaaadeuh...
Un jour comme un autre en 1986
Jaime pô Sardou.
Nempêche que...
Même pas la force dempêcher cette ritournelle de me polluer le tête. Je viens de mépuiser â taper contre le mur en sanglotant comme un bébé : ? Pourquoi moi, quest-ce que jai fait ? ? . Cest vrai, â la fin, quest-ce que jai fait ? Chaque fois que je sors un peu la tête, pan ! Un coup au dessus, un coup en dessous. Grunthaler mavait parlé de balancier. Monique, elle veut que je mallonge. Mais faut aussi les allonger et jai plus de sous. Je veux PLUS VIVRE, moi. Mais pourquoi jai pas osé mettre la tête dans le four ya vingt ans ? Mais pourquoi jai pas avalé tous mes cachets lan dernier, javais bidule qui était lâ pour maider. Ce se trouve pas tous les jours, quelquun qui vous rend ce service ! Au lieu de ça, je me suis retrouvée aux urgences, mont foutu un tuyau dans la gorge avec un entonnoir au bout. Et ils se sont foutus de ma gueule, en plus. ? Regarde, elle tient le tuyau ! ?. Les CONS, ils croyaient QUOI ? Que jaillais le laisser se balader dans mon estomac, ce foutun tuyau ? Javais pas envie davoir MAL, moi ! Finalement, jai cédé, je me suis allongée, après mêtre beaucoup assise. Cest persuasif, les psychanalystes.
Comme je lai dit dans ? Diagnostiquée par Michael Crichton et Kerry Weaver ?, je déconne de naissance. Cest moi qui le dis, pas mon entourage. Cest moi qui le ressens, daussi loin que remontent mes souvenirs. Jai été une enfant maladivement timide, sauvage, mal â laise, tristounette, une ado déprimée, une jeune femme qui alignait les dépressions très dures et collectionnait les histoires amoureuses pour se détourner de ses envies de mourir. Incapable dassurer un quotidien cohérent, révoltée, agressive, écorchée, revendicative, insoumise, instable. Malheureuse.
En bonne fille de 68 -
en 68, javais 18 ans et une première année de fac derrière moi, je me suis bien évidemment tournée vers le freudisme. Il ny avait que ça, â lépoque, une bonne psychothérapie dinspiration psychanalytique (Pip) où plus sélect, une psychanalyse et des antidépresseurs, mais pas trop, attention danger, camisole chimique. Moi, la chimie, je nétais pas contre, peut-être parce que papa travaillait dans le domaine ;). Je rêvais (déjâ , dès lâge de 15 ans) dune petite pilule qui me remettrait daplomb. â?a ma très probablement sauvé la vie. Tant mieux ou tant pis, cest selon. Tout â fait entre nous et en incidente, je préfèrerais nêtre pas née, mais chut ;).
Mon premier thérapeute était un type bien.
Je le sais. Jy ai bien réfléchi depuis que je sais tout. Mais il navait que les connaissances de lépoque, cétait en 1972. Il était aussi peu freudien quon pouvait lêtre. Je suis certaine que si javais consulté aujourdhui chez lui il maurait diagnostiquée vite fait bien fait. Et zou, le thymo qui va bien. Pour lépoque, il a fait ce quil a pu. Il me prescrivait des médicaments et il ma poussée â quitter lenseignement, ce qui fût une excellente chose. Et il ne ma pas emme**** avec linévitable ? parlez-moi de votre mère ? que je nai jamais bien supporté. On sest vus sept ans puis il ma poussée dehors, quand jai quitté lenseignement, en 1979.
Ma seconde thérapeute était une pure et dure.
Jen reprenais une tranche pour retour en fanfare dattaques de panique et maltraitance â troisième grand amour. Cétait en 1983. Elle ma dit très vite que je résistais beaucoup et a même essayé de me faire faire joujou avec de la pâte â modeler, sasseyant â côté de moi sur le divan. Brave Môman, va. Moi, jétais une gentille fifille qui essayait de faire tout comme il faut. Bin vi, je voulais plus souffrir, moi. Alors je travaillais, je travaillais, je notais mes rêves, je cherchais partout le gros caca caché, je me grattais les neurones jusquau sang, jexultais quand je sortais de chez elle en pleurs.
Et je ne trouvais RIEN ! Ou si peu. Mes parents étaient timides. Ils étaient froids. Ils ne nous avaient jamais câlinés quand on était petits. Mon père ne sintéressait pas â nos désirs mais rien quaux siens, rendez-vous compte, il ne voulait quune chose, quon réussisse socialement, grâce â un beau métier. Scandale, il voulait que je fasse des études pour devenir médecin ou quelque chose du genre. Et pareil pour Annie et Bernard. Pas étonnant quon ait tous foiré, nest-ce pas ? Moi après trois ans de fac, ma soeur en ayant juste le bac et mon frère même pas. Tenez, mon frère, il a même essayé de lacheter en lui payant une moto pour quil réussisse son bac ! Un vrai salaud, je vous dis.
Deux ans de Pip et un an de divan pour en arriver lâ !
Ah non, quand même. Comme, aussi gouroutisée que je fusse, je trouvais ça un peu léger pour expliquer un tel mal-être, je me suis dit que peut-être javais été violée par mon père et que javais scotomisé (mot savant de psyk pour dire refoulé, oublié) lévénement et que, â force de travail, le souvenir remonterait. Et alors je serais guérie. Sympa, non, le freudisme ?
Et le diagnostic, dans tout ça ? Bin, Y EN A PAS. Avec les psychanalystes, il ny a jamais de diagnostic. Quand vous leur demandez ce que vous avez, ils vous répondent, au choix :
− A votre avis ?
− Mais encore ?
− Parlez-moi de vous !
− Parlez-moi de votre mère, père, chien, chat, raton-laveur, compte en banque...
− Je ne veux pas vous coller une étiquette.
Le thérapeute suivant, pour mémoire (voir diagnostiquée par la série Urgence), je lai consulté de 2000 â 2003. Je dirais que cest le pire. Il ma diagnostiquée et ne me la pas dit !
Précisions importante, jai toujours choisi des psychothérapeutes qui soient médecins psychiatres, afin quils sachent écarter toute maladie dorigine organique (sic).
Le diagnostic, je lai posé moi-même
(cf ? Diagnostiquée par Michael Crichton et Kerry Weaver ?, jadôreeeeee ce titre lol).
? Je lai trouvé toute seule ? comme chanterait ma Véro, la Sanson que jadore. Tiens, encore une qui signore. Trop de boisson, trop dhommes, trop de fêtes, son Michel quitté elle ne sait toujours pas pourquoi.
Découvrir ma maladie a été littéralement trouver ma vérité. Un soulagement indicible. Mêlé dun peu de honte quand même. Et de peur. Voilâ -t-y pas que je suis une malade mentale. Cest sûr que ? névrosée ? cest plus glamour. Et daprès les description, les bipolaires ont de bien étranges conduites. Est-ce que je peux perdre le contrôle â ce point un jour ? Maintenant que jai connu lhypomanie, est-ce que ça va saggraver encore ? Mais quand même, le soulagement était de loin le sentiment le plus fort.
Sur tous les sites web, on me décrivait. Je nétais plus une paumée, une anormale, une individuelle face â sa famille dangereuse, jétais une malade parmi dautres qui pouvait être soignée par des médicaments. Je nétais plus ni coupable ni responsable, je navais pas mal travaillé en analyse, javais subi, je subissais des yoyotages chimiques de mon cerveau.
Ni coupable, ni responsable. De mes études ratées, de mes difficultés â vivre normalement, de mes dépressions, du mal que javais fait â mes amours, â mes amis, de mes congés maladie â répétition, de mon agressivité. Ni coupables ni responsables mes parents, que je pouvais enfin aimer tranquillement.
Alors a commencé un long travail de relecture de tout mon passé sous ce nouvel éclairage. Passionnant. Apaisant. Cicatrisant. Curatif.
Mais ça, cest mon histoire :).
Marie
Administratrice de bipolaire-info... et de sa vie ;)