11 : dans lantichambre de déconditionnement psychologique
1/01/2009
Témoignages > Cyclothymie > Dear Siobhan
J’y avais pensé pendant tout le week-end
Je méditais encore dessus en me rendant au cabinet rue de Rennes le Lundi soir pour ma première séance de thérapie avec Câline.
« … Quels avaient été mes sentiments en écrivant cette phrase ?… Qu’est ce qui se cachait derrière ces mots ? »
Mais les réponses étaient comme bien souvent dans les questions.
La souffrance, l’amour, l’espoir, la joie sont des sentiments â part entière, VIVRE c’est les ressentir. Lâ où le bas blesse c’est que certains ont un rapport très particulier avec ces EMOTIONS, leur appréhension est tout autre. Perversement lovés, le psychique s’entremêle au physique, jusqu’â s’y soustraire, ce que d’autres appellent angoisse, craintes, stress... certains les traduisent par écrasement, douleur, torsion...
Les cicatrices de notre vécu crevassent nos pensées. Les mains couvertes d’échardes nous n’osons parfois même plus effleurer la vie, même si ce n’était que du bout des ongles. Il est dur dans ces conditions de pouvoir ci rattacher, se cramponner. Cela faisait-il de moi un extravagant, ou un honteux hypocondriaque, défaitiste, menteur, égoâ?ste et alcoolique. Non loin de lâ . Je sais maintenant que je suis plein d’AMOUR, tout comme les « autres », j’aspire au bonheur. Je dis les « autres » sans être péjoratif.
La différence existe.
Je n’en ai pas toujours eu une notion aussi claire qu’â présent, mais au travers de mes actes j’en avais acquis une amère constatation, la preuve irréfutable et effrayante d’une déviance psychopathologique. Je t’avais perdu pour de bon et m’étais perdu également dans les ressentiments que j’entretenais. Honteux du chaos que j’avais semé dans ta vie, celle de mon fils qui refusait encore de me voir après le traumatisme qu’il avait subi en voyant successivement son père dans un état de manie furieuse, en pleine logorrhée lui parlant tantôt en français tantôt en anglais, incapable de l’appeler par son prénom.
Par la suite en sortant in extrémisme d’une maison en flammes, l’épisode pour lequel je souffre encore d’un black-out total. Alors même si je ne pouvais plus remonter en arrière de 2 ans pour être avec celle que j’aime â ne vouloir plus jamais serrer personne dans mes bras ni sentir le souffle calme d’un corps qui dors emboîté tout contre moi, je devais tirer un trait définitif au moins pour mon petit Seymour, j’avais décidé de me prendre réellement en charge, pour lui épargner â l’avenir le spectacle hideux de ma détresse, effacer dans sa mémoire l’image déroutante de cet inconnu tremblant et convulsif.
Avec mes premières ordonnances, de sel de Lithium en Teralithe 400 mg ainsi que de l’acide Valproâ?que sous 500 mg de dépakine, je devais effectuer un bilan hépatique et sanguin, NFS, plaquettes, créatininémie, une Lithiémie et une dépakinémie â faire dans un mois. J’avais également consenti â participer â un protocole d’étude et accepté de suivre la TCC.
C’était une salle d’attente beaucoup plus occupée que je retrouvais ce soir lâ . La secrétaire m’avait reconnue â mon arrivé, c’est bien cela le grand inconvénient avec mon nom c’est que bien malgré moi il est très marquant, « Ah, Bonsoir Mr Yav mains, au moins on se rappelle bien de votre nom… veuillez vous installer, Câline ne devrait pas tarder â finir sa consultation. »
Après une dizaine de minutes, elle s’était présentée devant moi avec un sourire chaleureux â l’émail rayonnant. Vêtue en grande partie de noir, cela mettait de la lumière sur son visage halé autour duquel tombait une chevelure dense couleur ébène. Sa poignée de main était franche et elle avait ce petit tic d’opiner légèrement de la tête pour accompagner le mouvement. J’avais estimé quelle avait sensiblement ta taille en la précédant pour m’installer dans l’un des fauteuils qui se faisaient face quasiment au centre de la pièce. Il y avait sur la gauche une étagère encastrée aux portes de bois sombres. Un peu plus loin â environ une trentaine de centimètres, un grand bureau de verre transparent sur lequel il était disposé une lampe au socle doré, la statuette d’un bouddha en méditation, une pochette â mouchoir confectionné de tissus et broderies de style orientales, une peinture d’enfant encadrée et un Notebook Apple noir connecté â une imprimante HP placé sur un meuble bas â tiroir juxtaposent. Contre le mur de droite s’étalait un divan de psychanalyse d’ergonomie new âge, qui tout comme le reste des sièges était de cuir noir.
Installé je faisais face â la fenêtre, en symétrie avec deux grandes plantes vertes de part et d’autre, elle laissait filtrer la lumière tamisée des lampadaires â travers les stries des stores â lamelles en tissus d’une couleur brique plus claire que celui des murs peints â la spatule. C’est dans cette atmosphère sombre mais intimiste que j’ai passé quasiment tous mes lundis soir de 19h â 20h. Une antichambre de déconditionnement psychologique comme le passage obligatoire au purgatoire des âmes en peines. J’y étais hier encore pour ma séance de purification juste avant mon bilan du mois de mars avec Hantouche.