04 : Je doute de tout
31/12/2007
Témoignages > Comorbidité > Mon combat contre les TOC
Je suis contrainte darrêter de travailler un mois pour faire une cure de sommeil â domicile. Bien sur je culpabilise . Celle-ci a été prescrite par mon médecin généraliste qui nexerce plus maintenant
malheureusement. Le traitement est fort (deux comprimés dAnafranil) et je dors toute la journée. Je reprends tant bien que mal mon emploi et je vois une psychologue dans un hôpital public sans aucun résultat. Elle me regarde dans les yeux lors des séances en attendant que je lui parle. Drôle de thérapie !
AVRIL 1994
Jai des migraines atroces avec des troubles de la vue qui mempêchent de rester debout. Je reste deux â quatre heures sur mon lit en attendant que cela passe. Lors dune consultation chez un généraliste â ce sujet celui-ci mannonce quil sagit dune artère qui se comprime derrière la tête. Ce phénomène est directement lié au stress. Comme jai peu de tension il me fait hospitaliser en urgence. Je subis les examens de rigueur en complète léthargie : au cours dun électroencéphalogramme je prends une claque par linfirmière car je suis en train de tomber dans les pommes?
Le chef de service de cet hôpital public diagnostique un épuisement physique et neuropsychique. A ce moment lâ jaurais dû arrêter les frais et me faire soigner énergiquement mais comment et par qui ?
On menvoie chez un premier psychiatre privé. Quel choc quand jai lu ce mot sur la plaque â lentrée du cabinet. Il me fallait accepter davoir une ˮmaladie psychiqueˮ qui se soigne chez un ˮpsychiatreˮ et surtout le faire accepter aux autres. Il me donne un traitement danti-dépresseurs (Anafranil encore en doses moins élevées). Pourtant moi je ne me sens pas déprimée. Jai juste des manies envahissantes. Je reprends le travail un mois après. Il est hors de question que celui-ci, auquel jai consacré tant dannées détudes, ne pâtisse de mes problèmes privés.
Je sais aujourdhui quune thérapie comportementale (jexpliquerai plus loin ce terme) associée â du repos aurait sans doute suffit â ce moment lâ pour men sortir. Mais il faut bien faire vivre les laboratoires?
Hélas les médicaments chimiques ne me sont daucun secours.
En effet dautres manies apparaissent. Le toc est mobile cest-â -dire quune manie peut être remplacée par une autre. Je me réveille toujours fatiguée et même plus quavant â cause du traitement. Je me ? traîne ? comme on dit. Lorsque je fais ma douche jai peur doublier un endroit donc je recommence une fois, puis deux et je ménerve. Pour évacuer la rage que jai envers ces rituels je donne un coup de poing dans le mur de la salle de bain. Avant de quitter la maison je regarde pendant cinq minutes si jai bien fermé le gaz, les lampes, les portes. Je me remémore mes trajets en voiture avec le nombre de feux rouges et de stops. Je me lave souvent les mains avec un minimum de trois savonnages â chaque fois. Après la cantine, je suis obligée de me réciter mentalement mon repas pour me sentir bien. Cest ce que lon appelle un rituel mental. La plupart de mes rituels étaient ainsi. Je misolais pour ? analyser et digérer mes peurs ? sur mon lit par exemple ou dans les toilettes. Cest pour cela que jai pu cacher le plus longtemps possible ma souffrance et que je nai jamais fait trop pâtir mon entourage?
Comme je suis toujours en retard malgré un poste â mi-temps â ma demande jai aménagé mes horaires pour pouvoir effectuer toutes mes heures. Heureusement jai un chef très compréhensif cette fois.
Les vérifications (ou rituels) deviennent tellement nombreuses au bout dun moment que la journée nest plus consacrée quâ çâ . Cest le cancer de lesprit. Vous vous substituez â ce dernier. Je mexplique. Le cerveau nous dicte nos actes et nous les faisons sans réfléchir inconsciemment et sans effort.
Une personne atteinte de tocs, elle, na plus du tout confiance en elle. Elle doute de tout. Elle est obligée de vérifier tout ce quelle a fait de peur de sêtre trompée. Elle est consciente de labsurdité de son comportement mais elle doit agir ainsi pour retrouver une certaine tranquillité doù un épuisement inévitable â la longue.
Cest ce qui était en train de se produire pour moi sans que je puisse mettre un nom dessus tout comme les psychiatres que je consultais dailleurs.