01: Découverte dun site sur la cyclothymie
31/12/2008
Témoignages > Cyclothymie > Moi, ma cyclothymie...Moi ?
Ce témoignage nous a été transmis par Régis BLAIN et publié avec laccord de lauteur, Stépahnie
Je mappelle Stéphanie, jai trente ans dans deux semaines.
Jai découvert le blog (Cyclothymie & Vérité de Régis BLAIN) il ny a pas très longtemps, en cherchant des informations sur ma maladie, diagnostiquée depuis, mais que jai découverte seule.
Je tenais â vous écrire pour vous remercier de votre travail qui maide souvent, et puis également pour apporter mon témoignage. Je ne sais plus qui a dit cette phrase mais la souffrance de quelquun est inutile si elle naide pas les autres â sen sortir. Ainsi, en espérant que les suivants ne souffriront pas â leur tour dix ans derrance médicale, et que mon histoire est intéressante pour un cyclothymique ou quelque travail? la voici :
Jai très peu de souvenirs, et dans ma mémoire, les années, les visages et les évènements se mélangent dans le tourbillon permanent et infernal de mes pensées. Il est donc très difficile pour moi de raconter mon histoire, car je ne sais rien situer dans le temps avec précision.
Sur mon passé le plus lointain, je pourrais dire que je me souviens avoir été une enfant très solitaire. Longtemps jai cru que cela avait été lié â mon statut denfant unique. Aujourdhui je ne sais pas, mais je sais que depuis toujours je me sens différente, comme venue dun autre monde, et que mon approche des autres en a toujours été affectée.
Quand jétais petite, je croyais que je venais dune autre planète. Jétais entourée damour, et ce nétait nullement pour remettre en question mon appartenance â ma famille. Mais il a toujours été évident pour moi, même petite fille, que les gens autour de moi ne ? fonctionnaient ? pas comme moi : il ny avait donc pas dautre explication â mes yeux.
Le plus flagrant, était sur les émotions. Je voyais très bien que personne ne ressentait les choses comme moi, naimait comme moi, navait peur comme moi. Je me sentais extraterrestre, terriblement incomprise, et le monde, ne formant quun, contre ma personne, nétait quinjustice et fatalité.
Je pourrais dire aussi que depuis toujours, je suis plus éveillée, plus attentive, plus sensible. Et la créativité, je dirais même lobsession de la création, a toujours été lâ .
Je ne sais pas pour les autres, mais il est évident pour moi que je suis cyclothymique depuis toujours. Jai été une enfant cyclothymique, et la maladie na pas attendu lâge adulte pour se déclarer.
Mes premières terreurs se sont manifestées â lâge de quatre/cinq ans. Javais déjâ peur de la mort, il marrivait dy réfléchir de manière obsessionnelle, et javais (â linverse ?) des nuits sans sommeil? Mon esprit encombré par des réflexions fulgurantes sur lunivers, Dieu, le sens de la vie. Je me souviens que je le trouvais parfois, et que le lendemain, je nen avais plus aucun souvenir.
Tout cela semble terriblement sérieux â lire, mais pour moi cétait du délire denfant, et tout comme je passais mon temps â inventer des histoires, jai uniquement cru que javais une imagination débordante.
Il faut dire que jétais une enfant très heureuse, épanouie, précoce. La ? maladie ? nen était donc pas vraiment une. Je me sentais incomprise et rejetée, mais lamour de mes parents et lexistence fusionnelle que jai eue avec eux mont suffi.
Jusquâ ladolescence?
Cest le début des idées noires, du sentiment quil ny a pas de place pour moi, que je suis trop différente pour ce monde.
Cest aussi la période de tous mes excès : mon intolérance infernale des gens qui ne pensent pas comme moi, nagissent pas comme moi. Mes amis nont pas intérêt â sécarter du chemin que je trace pour nous, sinon je les expulse sans procès, persuadée dêtre la détentrice de ce qui est bien et de ce qui ne lest pas, et quon doit mesurer les choses â mon aulne. Je dis comment il faut se comporter, ce quon doit faire et ne pas faire. Jai un avis sur tout, et je sais que cest le bon.
Je suis jalouse et possessive. Je ne tolère même pas que mes amis aient dautres amis. â?a me rend malade, jai limpression quon mabandonne. Si on aime quelquun dautre cest quon ne maime pas, car on doit maimer absolument et totalement, naimer que moi. Sil reste de la place dans leur coeur, cest quils ne me le donnent pas tout entier, â moi, alors je nen veux pas.
Rien ne va assez vite : le temps, le rythme des cours, lapprentissage. Les gens ne sont pas assez passionnés, engagés, révoltés. Je les trouve nuls, je trouve tout nul, en dessous de tout.
Alors je finis par menfermer. Au même moment, coâ?ncidence ou pas, je découvre le cinéma. Je deviens cinéphile, hyper cinéphile, obsédée par le cinéma. Je ne pense plus quâ une seule chose : voir des films et en faire. Jécris des histoires depuis toujours, le cinéma devient ma vocation et plus rien dautre na dimportance.
Je passe, plusieurs années, enfermée dans le noir de ma chambre, par toute saison, â visionner des milliers de films. Je nen sors que pour manger et aller au lycée.
Je crois que mes parents ne disent rien car les autres ont de gros problèmes avec leurs ados, alors que moi je suis sage, gentille, obéissante, excellente élève, je ne sors pas le samedi soir et je ne fréquente pas les garçons. Je reste â la maison, je ne fais pas de bruit, jaime mes parents et je ne me dispute pas avec eux. Jai aussi des amis que je vois le mercredi. Parfois ça finit en drame (voir les causes plus haut) mais cela na pas lair très différent des autres histoires adolescentes.
Alors la maladie passe encore inaperçue.
Mais quelle maladie ?
ps : en gras, des signes évocateurs de cyclothymie juvénile (par Dr H.)