Quand ce n’est pas pathologique
11/09/2010
Témoignages > Cyclothymie
L’apprentissage n’était pas toujours facile mais je l’ai bien intégré. Attention ! j’ai des projets, je dors moins, je rigole tout le temps, je mange peu, j’ai un grand appétit sexuel, je veux faire du shopping ; est-ce que je monte ? Est-ce qu’il me faut un neuro ? Fais gaffe ! Je suis fatiguée et j’ai du mal à m’endormir, je n’ai envie de rien faire, tout le monde m’énerve, j’en ai marre ; est-ce que je déprime ? Est-ce qu’il faut ajouter un antidépresseur ? Je remplissais des tableaux avec mes traitements, les heures de sommeil, les événements déclencheurs ; j’ai appris à m’observer. J’ai compris et j’ai appris à me connaître ; je sais quand ça ne va pas.
En ce moment je suis fatiguée, j’ai du mal à m’endormir et je dors peu, je n’arrive pas à tout faire, parfois les gens m’énervent. J’ai quelques projets en tête, j’ai fait chauffer la carte bleu dernièrement. Est-ce que je dois en parler avec mon psy ? Ajuster mon traitement ? Eh bien non, je ne pense pas. Je pense tout simplement que comme pour tout le monde ce sont des choses qui arrivent.
Si je dors peu, je suis fatiguée et j’ai du mal à m’endormir c’est parce que je travaille la nuit, j’encaisse des décalages horaires et j’ai deux touts petits à la maison. J’ai chauffé la carte bleu parce que j’avais envie de me faire plaisir avec un héritage. J’ai des projets ? tant mieux ! Il sera temps de faire des choses auxquelles je pense depuis des années pour préparer notre avenir. Les gens m’énervent ? parfois il y a de quoi !
Où se trouve la ligne entre normale et pathologique ? Comment savoir si je dois m’inquiéter ou laisser passer ? Comment expliquer que je peux avoir un coup de mou ou péter la forme sans que ce soit un nouvel épisode qui commence ? Cela ne fait pas parti de la "bipo éducation" dont on entend parler qui s’arrête souvent à la reconnaissance, gestion et prévention des hauts et des bas. C’est une deuxième apprentissage qui commence, comment savoir quand c’est normal ; est-ce que je peux en être certaine ?
Peut être que je peux en être sûre parce que ce n’est pas comme des autres fois. Ce n’est pas comme avant d’être stabilisée, ce n’est pas comme après mon premier bébé, ce n’est pas comme lorsque j’ai été déstabilisée par un nouvel moyen de contraception. Ces fois là j’ai su que ça n’allait pas et j’ai pu réagir à temps pour garder le cap. La différence est que je ne sens pas les sables mouvants sous mes pieds, je n’ai pas la sensation que moi, que ma vie, va se découdre comme les mailles d’un tricot.
Je continue à me surveiller, à m’observer de loin ; parfois ça m’emmerde mais je m’y adhère encore et toujours. Je me fais confiance, mon psy me fait confiance. Mon entourage doit aussi apprendre à me faire confiance et accepter que tout n’est pas pathologique.
Peut être que je me trompe, peut être qu’en effet j’ai raison. Mon psy m’a proposé un moyen de savoir, c’est normal jusqu’à preuve contraire.
