Ces enfants avec symptômes multiples
2/07/2013
Témoignages > La cyclothymie juvénile
Une vie si pudiquement dévoilée, la souffrance cachée par un rire, ne pas oser dire lʼinsoutenable, une volonté farouche de sʼen sortir, et puis cette peur tenace de ne pas être cru, la douleur dʼêtre remis en cause sur la véracité de ce que lʼon est obligé de raconter une nouvelle fois pour trouver une solution. Le désarroi absolu de lʼimpuissance.
« Je prends lʼappel, ce nʼest pas mon média préféré… Ais-je bien accusé réception de la souffrance de cette maman ? Chez moi aussi, il y a des crises, des lassitudes, des trous dans les murs, plus de scolarité… Mes doutes, je les mets de coté, allez madame ensemble on va y arriver »
Mais quʼest-ce quʼils ont nos gosses ? TDAH*, DYS*, TED*, TCA*, EIP*, TP*L, TCA*, TO*P, TOC*… Tic, tac, oui, non, crise, calme, encore… 3 colères par semaine, "on ne va quand-même pas les diagnostiquer « Dysrégulation Sévère de lʼHumeur »" dit un psy dans un article contre le DSM V.
Mais il ne vit pas avec ! Que propose-tʼil à :
Léa, 14 ans, qui se scarifie, a fait plusieurs tentatives de suicide, frappe sa mère jusquʼà lʼinvalidité qui la conduit à un licenciement. Léa a une addiction au cannabis et lʼalcool depuis ses 12 ans, son comportement est si problématique quʼelle est placée en famille dʼaccueil. Sa mère me parle de ses changements brusques, mais aussi de sa sensibilité, du fait quʼelle est attachante, que sa scolarité est brillante quand elle veut. Léa est courageuse, elle a réussi à se défaire de son addiction « à la volonté » ! Cette maman nous appelle, elle veut un diagnostic, que lʼon reconnaisse que cʼest un problème de santé et récupérer sa fille.
Lucas, 13 ans, dont la grand-mère est bipolaire, a un comportement orageux. Il se met tout nu à lʼécole quand il se sent incompris, se tape et se griffe, devient violent quand on tente de le stopper. Il a saisie lʼassistante sociale de la mairie pour être placé en famille dʼaccueil, il ne supporte plus de faire souffrir ses parents.
La famille est au bord du divorce. Lucas a été hospitalisé au CHU dans le service dʼun grand pédopsychiatre, le diagnostic tombe : Trouble de lʼhumeur. La prise en charge est reléguée au CMP ou ils contestent le diagnostic : cʼest un problème mère/fils.
La consultation dʼun autre pédopsychiatre confirmera le diagnostic, lʼenfant est mis sous Dépakine. Lucas et sa famille souffle, il ne lui manque plus que la psychothérapie pour apprendre à gérer ses émotions, ses humeurs.
Maylis, 8 ans qui a un trouble anxieux et des violentes colères, des humeurs chaotiques. Elle a été diagnostiquée cyclothymique. Sa grand-mère est bipolaire. Lʼenfant dicte sa loi. Bien que soutenue par une solide psychothérapie, certaines crises ne passent pas. La famille a besoin dʼun soutien parental.
La tribu de Lotulys est composée
4 exemples brossant les cas les plus fréquents qui viennent à Bicycle. Jʼai préféré modérer mes exemples, la plus petite a 8 ans, mais jʼai des appels pour des enfants bien plus jeunes ! Et oserais-je lui dire quʼune grande majorité de mamans déclarent avoir un tempérament cyclothymique ?
Il se refuse à enfermer lʼenfant dans une pathologie. Il liste donc tous les symptômes.
Cela irait plus vite de lister ceux quʼils nʼont pas !
Il pense donc que cʼest originel. Il nʼa pas tord, autant de problèmes est le signe une pathologie unique. Oui mais laquelle ?
Comme il se refuse à conceptualiser et chercher, il nous propose dʼattendre que cela se stabilise avec lʼâge. Gagné, à lʼâge adulte lʼinstabilité est une donnée stable !
Entre temps il tente de soigner par la raison/parole la personnalité, les envies, les motivations dʼun enfant. Mais que croit-il, que nous parents nʼavons pas essayé ? Quʼil fera mieux que nous ?
La pédopsychiatrie serait-elle présomptueuse ?
Toute la recherche sur les maladies mentales est conceptuelle. Ainsi dénoncer le façonnage de la maladie (Disease Mongering) cʼest dénoncer lʼessence même de la médecine clinique. Sous prétexte que les labos comptent en tirer bénéfice, on préfère rejeter le peu de solutions qui nous sont offertes.
Mais quelle mouche pique la société Française de préférer laisser 10% de sa population sur le bord de la route plutôt que de réguler les laboratoires et de réformer la psychiatrie ?
Lors de la conférence Bicycle du 25 avril 2013, nous avons vu 2 médecins, un pédiatre et un psychiatre se comprendre et répondre dʼune même voix. Parce que oui, il sʼagit de médecine avant tout.
Je ne sais quel mystérieux trouble grève la vie de nos enfants, mais ce que je sais cʼest que :
Dès lors pourquoi refuser de diagnostiquer et soigner un trouble sévère de lʼhumeur, une cyclothymie ?
* TDAH : Trouble du Déficit dʼAttention avec ou sans Hyperactivité
* TED : Trouble Envahissant du Développement (Autisme)
* DYS : Trouble DYS : Dyslexie, Dyspraxie, Dysorthographie, Dyscalculie…
* EIP : Enfant Intellectuellement Précoce
* TPL : Trouble de la Personnalité Limite (Borderline)
* TCA : Trouble du Comportement Alimentaire
* TOP : Trouble de lʼOpposition avec Provocation
* TOC : Trouble Obsessionnel Compulsif
Si ce n’était pas de la bipolarité juvénile, qu’est-ce que ce serait ?
