Dépistage du trouble BP-II avec la clh-20
31/12/2007
Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Spectre bipolaire : dépistage
Malgré cette définition apparemment simple, le trouble BP-II paraît plus complexe et soulève encore de nombreux défis actuels, tant dans son dépistage que dans sa phénoménologie, comme saisir les différences par rapport au trouble BP-I et au trouble dépressif unipolaire (5, 9, 16).
Rappelons que cette entité a été proposée en 1976 par David Dunner (7). Le cumul des données concernant la morbidité (psychosociale et somatique) et la mortalité liées au trouble BP-II ainsi que les retentissements psychosociaux, professionnels et économiques (6, 11, 13, 14, 15), exige un dépistage précoce de ce trouble, une tâche qui demeure difficile à obtenir dans la pratique (5, 8, 16). Une meilleure connaissance du trouble BP-II incite à une amélioration et une innovation des approches diagnostiques utilisées par les cliniciens.
Le diagnostic du trouble BP-II nécessite donc le recours au dépistage systématique et à lʼautoévaluation de lʼhypomanie (1, 10). en effet, les épisodes hypomaniaques sont souvent passés sous silence, les patients consultent en phase dépressives et les praticiens se focalisent sur les épisodes dépressifs actuels. De plus, il est difficile de porter le diagnostic correct en se basant sur la dépression actuelle, malgré quelques caractéristiques différentielles entre les dépressions bipolaires et unipolaires (5, 9, 16). On estime actuellement qu’un tiers à 50% des diagnostics de dépression unipolaire sont erronés et correspondent à une dépression bipolaire (5).
La dépression inaugure une fois sur deux le trouble bipolaire et justifie des mesures thérapeutiques spécifiques. En lʼabsence dʼune thymorégulation adaptée, le recours aux antidépresseurs risque d’aggraver et accélérer le cours évolutif du trouble (formation de cycles rapides), dʼinduire de virage (hypo)maniaque de lʼhumeur, mais également des cas de résistance et de dépressions mixtes chroniques (5, 16).
Afin d’accéder au diagnostic de bipolarité, le dépistage systématique de lʼhypomanie est faisable à lʼaide dʼautoquestionnaires, comme le MDQ, questionnaire des troubles de l’humeur (12) et la check-list dʼhypomanie dans sa version originale la CLH-20 (2, 10) et élargie la CLH-32 (4).
Trois enquêtes nationales "bipolact" ont été mises en place pour dépister le trouble BP-II : 2 enquêtes sur les dépressions récurrentes (une chez les médecins généralistes et une chez les psychiatres) et une enquête sur les dépressions résistantes (avec les psychiatres). Au total, 623 médecins ont participé et 2396 patients inclus. Ces enquêtes ont mis en évidence une fréquence élevée d’hypomanie : chez 62% des patients souffrant de dépressions récurrentes et 55% des dépressions résistantes. Ces chiffres dépassent le taux de 40% initialement trouvé dans l’enquête précédente epidep (1, 8).
En effet, le ciblage des dépressions résistantes et récurrentes confirme que ces formes représentent un territoire privilégié du trouble BP-II, celui-ci étant caractérisé par un degré de récurrence plus élevé que le trouble dépressif unipolaire et par une résistance aux antidépresseurs (5, 16). Dans l’enquête de zurich, angst et al (3) ont montré, au cours d’une longue étude prospective, que la récurrence dans le trouble bipolaire (0,4 épisode/an) est deux fois plus importante que dans le trouble dépressif (0,2 épisode/an) et que le trouble BP-II était légèrement plus récurrent que le BP-I.
Un autre résultat important est à souligner : la similitude des taux de fréquence du trouble BP-II dans les enquêtes médecins généralistes et psychiatres. Cette donnée casse le mythe de la prévalence de la bipolarité chez les psychiatres et surtout encourage le dépistage précoce de la bipolarité chez les dépressifs consultants en médecine générale. Un résultat similaire a été obtenu dans la large enquête américaine sur le dépistage des troubles bipolaires à l’aide du MDQ (12).
La check-list dʼhypomanie
La check-list d’hypomanie (clh-20)
réponses par "vrai" ou "faux" - un score de 10 ou plus indique la présence d’une hypomanie
1. moins d’heures de sommeil
2. davantage d’énergie et de résistance physique
3. davantage de confiance en soi
4. davantage de plaisir â faire plus de travail
5. davantage d’activités sociales
6. plus de déplacements et voyages ; davantage d’imprudences au volant
7. dépenses d’argent excessives
8. comportement déraisonnable dans les affaires
9. surcroit d’activité (y compris au travail)
10. davantage de projets et d’idées créatives
11. moins de timidité, moins d’inhibition
12. plus bavard que d’habitude
13. plus d’impatience ou d’irritabilité que d’habitude
14. attention facilement distraite
15. augmentation des pulsions sexuelles
16. augmentation de la consommation de café et de cigarettes
17. augmentation de la consommation d’alcool
18. exagérément optimiste, voire euphorique
19. augmentation du rire (farces, plaisanteries, jeux de mots, calembours)
20. rapidité de la pensée, idées soudaines, calembours
Références
13. judd ll, akiskal hs, schettler pj et al. psychosocial disability in the course of BP I and II disorders : a prospective, comparative, longitudinal study. arch gen psychiatry 2005 ; 62 : 1322-30.
15. rihmer z, pestality p. bipolar II disorder and suicidal behavior. psychiatr clin north am 1999 ; 22 : 667-73.
Facteurs cliniques prédictifs de la non reconnaissance des troubles BP-I et BP-II
La complexité de la catégorie
BP-II nʼest pas une bipolarité atténuée