Résistance des TOC et confiance en soi
1/10/2010
Auteur : M Trybou
Anxiété / TOC > Techniques pour lutter contre les TOC
Le même jour, je reçois une autre patiente, une de mes plus anciennes encore en thérapie, et lui demande si le manque de confiance en soi n’est pas le noyau dur de sa difficulté à avancer. Elle me dit que les TOC l’empêchent d’avancer dans tout, le travail, faire un enfant, prendre son autonomie, mais qu’elle se sent de toute façon incompétente et inapte sur tout "déjà à la base". Elle me dit que lors d’une séance, nous avions fait un jeu de rôles pour régler un conflit entre elle et ses collègues et qu’elle avait eu moins de TOC les semaines suivantes car elle savait comment répondre et se défendre. "En fait, c’est comme si je faisais des TOC pour compenser ce que je ne sais pas gérer dans les conflits". Je lui ai donc indiqué l’utilité des séances d’affirmation de soi.
Au final, on voit que la proposition faites à ces deux patientes est un suivi pour affirmation de soi, l’idée étant qu’apprendre des techniques pour s’affirmer, gérer les conflits, faire valoir son avis et ses droits, augmenterait la confiance en soi générale et leur permettrait de se sentir dans un environnement moins hostile.
L’idée n’est pas que le TOC compense l’extérieur magiquement. Un environnement hostile est stressant pour tout le monde, même sans TOC. L’idée est que quand on a un TOC, notre cerveau est encore plus sensible au stress, et va donc provoquer encore plus de TOC. C’est parce que je ne sais pas gérer les conflits ou un situation particulière que je suis stressé à l’idée de devoir me confronter à mes collègues ou à cette situation, et cela provoque un sentiment de perte de contrôle. Dans le TOC, la zone du contrôle dans le cerveau, le pré frontal, est déjà hyperactive. Elle se retrouve donc encore plus stimulée, et fait donc encore plus de TOC. Le but n’est pas d’éradiquer tous les stress, car ils sont universels et permanents, mais d’augmenter notre capacité â y faire face (savoir dire non, répondre, négocier, se défendre).
On trouve la même chose chez la personne dépressive : dés qu’elle se sent dans une impasse, une situation qui la met dans l’impuissance, elle tombe en dépression ou sent une aggravation de sa dépression actuelle. Le cerveau part du principe que l’esquive ou l’inaction sont la meilleure protection. Le but de la thérapie est alors d’augmenter les ressources et habilités de la personne en faisant de la résolution de problème : comment résout-on objectivement ce problème ?
Par contre, il sera toujours important d’avoir en tête un autre axe de compréhension : on ne pourra jamais dire que tous les patients ayant des soucis pour avancer ont un manque de confiance en soi.
En effet : il y a quelques mois, un papa m’expliquait que, pour lui, si sa fille avait du mal à faire ses exercices de thérapie malgré sa totale compréhension du fonctionnement du TOC, c’est peut être parce que cela lui donnait ? un contrôle qu’elle n’avait pas ailleurs ?. Ce papa tirait cette idée de sa propre expérience "il a lui aussi des TOC" en disant que quand on ne maitrise pas une situation on a tendance à faire des TOC pour compenser, "comme pour acheter magiquement d’un côté un contrôle que l’on perd ailleurs". Nous décidons avec les parents de mettre la thérapie contre les TOC entre parenthèses et que pendant quelques mois les parents vont autonomiser et responsabiliser beaucoup plus leur fille : elle va devenir responsable des courses, mettre la table et la desservir, gérer le linge sale dans la machine, rentrer beaucoup plus souvent seule de l’école etc. Si elle devient un pilier de la famille et qu’elle constate que ses parents multiplient les preuves de confiance en elle, sa confiance en soi va augmenter. Quelques mois après, il s’avère que malgré les responsabilités confiées, la patiente a toujours les mêmes soucis de TOC. En discutant avec elle, on apprend que les exercices l’embêtent plus que ses TOC : "J’ai déjà réussi à retirer plein de TOC, et le peu qui me reste ne me dérange pas tant que cela".
Il y a donc des patients qui ont acquis un certain confort dans leurs rituels, des patients pour qui la thérapie est plus contraignante que le résidus de rituels qu’ils ont, des patients qui n’ont pas encore bien compris que le doute est un symptôme et non la preuve d’un danger. Et tous ces éléments demandent à être investigués avant de conclure que c’est le manque de confiance en soi qui joue.