Lamictal mon amour
13/03/2011
Témoignages > Se soigner
Cà passe, je ne rechute pas au bout de quelques jours. Jʼavais réduit les doses avant et pendant mes deux grossesses, là ça passait encore. Mais même au bout de quelques jours je sens les effets d’être sans traitement.
Je doute de moi. Je me demande qui je suis, ce que je fais là, ce que je fait avec mon mari, qui sont mes enfants et pourquoi ils mʼénervent autant que je les aime, non ?
Pour moi lʼamour est difficile sans mon Lamictal. Au bout de quelques jours sans prise, ou plusieurs jours mal pris je sors du monde ordinaire pour me sentir décalée, soucieuse, irritable, et surtout pas capable dʼaimer comme en temps normal. Cʼest très déconcertant de trouver mes proches si éloignés, si agaçants. Je ne suis pas entièrement dans ma vie, je la vie mais avec un pas en retrait donc dʼun autre point de vu. Je vois les choses autrement, jʼobserve, je remarque mais je ne suis pas totalement dedans. Je ne ressens pas les émotions de la même façon, agacement oui, amour non.
Cette personne là nʼest pas la vrai moi. Retirer mon traitement de mon quotidien laisse s’exprimer la cyclothymie. Elle se manifeste doucement sans faire de bruit. Elle est presque imperceptible au début mais je lui donne un peu de liberté, je dessers les liens, jʼentrouve la porte. Parce que je nʼaime pas sa tête je fini par me reprendre en main, prendre sérieusement mon thymo ou un neuro pour lui reclaquer cette porte, resserrer ces liens, la renfermée.
Pourquoi je ne le prends pas tous les jours, toutes les semaines correctement si je sais que ça ne me fait pas du bien ? Le cachet est trop gros ; je ne veux pas le prendre à jeun, jʼattends dʼavoir déjeuner ; je ne sais pas si je veux le prendre avec de lʼeau, du jus ou du lait ; le matin c’est la course je ne peux pas m’arrêter pour ça ; je lʼai oublié le matin mais je nʼaime pas le prendre le soir ; ça mʼemmerde de prendre des médicaments tous les jours. Cà fait chier.
Mais le temps où je pouvais me permettre de vivre rien que pour ma petite personne est révolu. Jʼai un mari, deux enfants une maison avec un crédit et un emploi, je me dois dʼassurer. Le soir je regarde mes enfants dormir. On ne peux quʼaimer un petit ange qui dort paisiblement, à moins quʼon nʼa pas pris son thymo depuis quatre jours. Dans ce cas je me demande qui cʼest cet ange, comment ça se fait quʼil est sorti de moi. Je me demande comment je vais lʼéduquer, lʼélever, lʼaimer. Je sais que je peux le faire, que je le fais, que je vais continuer à le faire, mais pour ce faire je dois continuer à avaler encore et encore, tous les jours de ma vie ce cacheton béni-maudit.
Le Lamictal ne me change pas, ne modifie pas mon caractère ou ma personnalité.
Il modifie ma cyclothymie, il lʼembête, la pousse, lʼécrase. Quand on ne voit plus la cyclothymie cʼest moi quʼon trouve. Lorsque jʼarrive à écarter la cyclothymie je peux vraiment vivre cette vie, je peux être heureuse ou malheureuse, paisible ou en colère, mais je suis moi. Et moi je sais aimer, je connais lʼamour, Mes amours sont mon mari et mes enfants, mes parents et ma soeur, mes meilleurs amis. Et le Lamictal.
