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Un self-management spécifique pour la cyclothymieUn exercice utile pour sonder son espritUn Bon traitement pour la cyclothymieSurconsommation des antidépresseurs chez les patients bipolairesStress et charge allostatiqueSe soigner sans que la vie devienne ennuyeuseQuels sont les risques des anti-dépresseurs dans la bipolarité ?Prise en charge psychologique de la dépression bipolairePremiers traitements des nouveaux bipolairesPeut-on se passer dʼantidépresseurPeut-on considérer le Trouble bipolaire comme une maladie organique ?Oméga3 et troubles de l’humeurN-AcétylCystéine (NAC) dans les troubles bipolaires et les troubles associésManie, acide urique et goutte : quels rapports ?Lithium augmentation dans les dépressions résistantesLes cyclothymiques sont-ils à ce point difficiles à soigner ?Les bonnes séquences pour soigner la cyclothymieLe bonheur et lʼApprentissage de lʼÉchec selon Tal Ben ShaharLa TCC est-elle efficace contre la dépression ? La remédiation cognitive chez les patients souffrant de troubles anxieux et de lʼhumeurKetamine et bipolarité résistanteIntroduction à la thérapie des schémasIntolérance à LamotrigineImpossibilité de changer le tempéramentImpact des tempéraments sur la santé physiqueHygièene de vie pour les bipolairesEMDREfficacité du Xeroquel® dans le spectre bipolaireDépression, bipolarité et inflammation chroniqueChoix des thymorégulateursCharge allostatique, cortex préfrontal et amygdaleBonheur et Optimisme selon SeligmanBipolarité Résistante : Quel espoir peut-on attendre ?Avoir une bonne santé mentaleAutour d‘AbilifyAntidépresseurs dans les troubles bipolaires : que disent les études ?Antidépresseurs dans la Dépression avec Hypomanie Sub-SyndromiqueAller vers une psychopharmacologie hippocratique
37 : Lʼangoisse ! Quelle soeur jumelle !36 : Quelques moments de sérénité dans un monde35 : une vie vraiment difficile34 : Maudite hypersensibilité33 : La MDPH me refuse encore un emploi protégé32 : J’écris sous le coup de la peur. 31 : Moi, les autres, le boulot30 : Une souffrance qui n’a pas de nom29 : Prescrivez moi une autre personnalité28 : mes conseils sur la prise des médicaments27 : Je reprends mon journal26 : j’ai besoin de mon day-dreaming25 : L’angle de vue de ma maladie évolue avec le temps24 : Un fond d’angoisse et d’insatisfaction23 bis : guérir au dépend d’une partie de mon imagination23 : patient partenaire22 : Je relis ce que j’ai écrit il y a des années21 : Besoin de construire un présent, penser au futur20 : Je suis stable, mais...19 : Ecrire, çà me déprime18 : Ma réactivité aux psychotropes17 : La question de la dysphorie me tarabuste encore16 : La maladie est une expérience de ma vie15 : rechutes, TOC, délire, insécurité, détresse14 : Chauffarde de la vie13 : La maladie bipolaire serait-elle fatalement le malheur de l’autre ou la déchirure du couple ?12 : Un peu de sagesse pour réduire la chimie de mon traitement11 : Je participe à un forum10 : L’art d’être la seule personne â me comprendre09 : J’en ai marrrrrreeeeeeeuuuuuuu !!08 : couple atypique ?07 : suis-je en dehors des conventions d’une maladie normale ?06 : une journée typique qui se répète05 : Je donnerais n’importe quoi pour sortir de ce puits sans fond04 : Aujourd’hui c’est la tristesse qui me fait écrire03 : Pourquoi autant de plaintes sans fins ?02 : Des petits matins où le café n‘a pas le même goût 01 : Comment être bipolaire aujourdʼhui

Addiction, quand tu me tiens par la boulimie

31/12/2007

Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Frontières / masques trompeurs

Témoignage d‘une patiente souffrant de troubles des conduites alimentaires qui se révèlent liés à une cyclothymie.

avant


Bébé, j’étais mince. Enfant, j’étais mince. Ado, je commence à varier avec plus ou moins huit kilos par rapport à mon poids idéal (en fonction de ma taille). Mais je fais des régimes, je maintiens la barre. A 18 ans, je suis mince. Pour me décrire en quelques mots, je suis sûre de moi, volontaire, têtue même, et j’aime plaire. Je suis quelqu’un à double facette(!). Ceux que je rencontre via l’école me connaissent généralement comme quelqu’un de timide et de terne. A l’extérieur, on me voit comme étant extravertie, dynamique, toujours partante.

A 18 ans, je rentre en prépa HEC. Pourquoi ne pas faire ça plutôt qu’autre chose puisque j’en suis capable et que je ne sais pas ce que je veux faire dans la vie. Faire une prépa est connu pour être quelque chose de stressant. Les élèves sont sous pression. Etais-je stressée ? Non, je ne me sentais pas stressée, mais pour la première fois de ma vie je me suis mise à penser en cours à ce que j’allais bien pouvoir courir aller m’acheter à la boulangerie pendant la pause ! Courir est bien le terme : 10 minutes de pause avec 5 étages à descendre (et donc à remonter) pour une boulangerie à au moins 500 mètres, en tenant compte du temps nécessaire pour manger, je vous assure qu’une pause de 10 minutes est très courte. Mais après tout où était le mal, la gourmandise a toujours été mon péché mignon ! Tant est si bien que je me suis mise à m’acheter mes "goûter" le matin, copieux les goûters, à manger le midi, normal, qui ne mange pas le midi, puis à la sortie vers 18 ou 20h, à m’acheter un ou deux sandwich avant de remanger le soir. Mais encore une fois qui ne dîne pas le soir. Et puis, il y a la nuit. Une nuit c’est long. Un frigo seul, ça s’ennuie. Alors à lui aussi, je me suis mise à lui rendre visite.

Au début ce n’était pas systématique. Mais j’y pensais pendant tellement longtemps avant de le faire qu’il m’était difficile de ne pas passer à l’action. Il m’arrivait même de faire de longs détours pour m’acheter ces aliments. Voilà l’engrenage est lancé, la bouffe est partie prenante de ma vie! Je ne m’avoue pas que c’est un comportement anormal, mais je fais tout de même tout ça en cachette de tous (mes parents, mes amis, mon mec) : ah, mauvaise fois quand tu me tiens !

Evolution (environs deux ans plus tard)


"Bonjour. Je voudrais deux Menus Best of Big Mac avec frites et jus d’orange, deux Sunday au chocolat et un Deluxe. Merci." Quelques minutes plus tard : "Bonjour. Je voudrais un Menu Quick’n Toast avec frite et un Longchicken. Ah, attendez, mon ami (au téléphone) me dit qu’il veut un autre Quick’n Toast, vous m’en mettrez donc deux. Merci. Au-revoir." Il n’y a bien sur pas d’ami au téléphone, mais comment assumer devant d’autres ce que je n’assume déjà pas moi-même. Je viens de commander trois hamburgers (menus) chez Quick en ayant déjà des menus MC Do pleins les mains. J’imagine ce que sont en train de penser les vendeurs. Me voilà prête à rentrer chez moi, VITE, maintenant, ça URGE! Je mange, je dois m’arrêter, mon ventre ne le supporte plus, j’ai mal, ma respiration en est même lourde tellement je suis pleine, mais après une courte pause, je continue : je dois terminer !

A cette époque, je ne sais rien. Je ne sais pas que je suis boulimique ! Je ne sais pas que je suis bipolaire ! Bref, je ne sais pas qui je suis. Et pourtant, j’en ai vue des émissions sur la boulimie, j’en ai entendue des personnes qui attestaient s’être reconnue après avoir vu ou lu des témoignages. Moi, NON ! J’ai mis 5 ans â le découvrir. A enfin comprendre que j’étais addict, que ma drogue â moi c’était la bouffe. Je n’avais pas besoin de seringue, pas besoin de dealers, etc. Non, ma drogue, elle était là partout, étalée et disponible.

Pendant cinq ans, j’ai cru que toutes ces souffrances qui ont été dû à la BOUFFE, n’étaient que ma faute ! Je ne devais m’en prendre qu’à moi car je n’avais pas la volonté de résister. Toutes mes amies sont minces, toutes mes amies surveillent leurs poids à 2 ou 3 kilos près et moi, même avec plusieurs dizaines de kilos en trop, je continue. Je vous laisse imaginer mes conclusions : je suis une nullité totale! Et puis à force de discuter avec ces amies, je m’aperçois que je suis différente. Je suis la seule à penser à la nourriture de manière obsessionnelle : chaque minute de chaque jour qui passe, j’y pense. Je ne dois donc pas seulement résister à la faim mais contre une envie quasi permanente de me ruer sur la nourriture. Lorsque je suis en voiture, chaque boulangerie, sandwicherie, MC Do, Quick, magasin alimentaire, etc., accroche mon regard et me pose la question : "Je m’arrête ou je ne m’arrête pas ?". Mais si je m’arrête, c’est razzia. Et, ce qui est acheté DOIT être terminé. Heureusement pour moi, dans ces moments, je n’achète que de la nourriture saine : carottes, chou-fleur, concombres, soupes Vous m’avez crue ? Bien sûr que non ! Ce serait trop beau. C’est tout l’inverse, il me faut de la malbouffe : l’idéal pour mes hanches, mes cuisses, etc., parce que, bien sûr, je ne vomie pas ! Certains diront tant mieux, c’est déjà ça de gagné sur la santé ; moi j’aurais beaucoup donné pour réussir à vomir parce que vous n’imaginez pas le nombre de kilos que j’ai pris et le nombre d’impacts que cela à eu sur ma vie et mon psychique : une catastrophe !

Aujourd’hui encore, je ne sais pas ce qui est pire : être addict à la bouffe ou à une autre drogue. Je me dis que les autres drogues, il faut passer le cap, mais qu’une fois qu’on a arrêté, on ne doit faire face qu’à leur souvenir. Moi, tous les jours, je dois toucher et jouer avec ma drogue. Je dois la consommer sans retomber dans le cycle infernal. Toutefois, j’admets donner cette opinion sans avoir jamais été soumise aux difficultés d’une autre addiction, alors toutes mes excuses par avance si je me trompe.

Rétrospectivement, cela me paraît incroyable d’avoir pu être "moi" et de ne pas avoir su que j’étais boulimique. La bouffe et ses conséquences ont été le problème central de ma vie pendant cinq ans et je n’ai pas su nommer le problème. Je n’ai pas compris que c’était une obsession : je me réveillais en y pensant, je m’endormais en y pensant, la journée j’y pensais. Bref, je vivais bouffe.

Vomir


Je ne vomis pas. Comme je l’ai dit plus haut, certains doivent dire "Alléluia.": une partie de ma santé est préservée : FOUTAISE !!

Depuis gamine, je déteste vomir. Même patraque, je trouve toutes les astuces inimaginables pour l’éviter. Alors, j’étais boulimique sans vomir. J’ai grossi, grossi, grossi. Mais je suis bipo, et j’aime plaire, plaire, plaire. J’en ai bavé. Je n’ai pas été tendre avec moi-même, mais la société l’est encore moins. Les gens aiment la norme. La différence fait peur ou intrigue. Ce n’est pas pour rien que les attractions des monstres de foire ont si bien marché pendant des dizaines d’années. Vous marchez dans la rue et vous voyez, ou bien vous sentez, les regards des gens sur vous. Ces mêmes regards que beaucoup lancent vers les handicapés, les clochards, etc. Ces regards font mal. Les propos qui les accompagnent souvent, encore plus.
Dans un groupe, en société, j’avais l’habitude que les gens viennent autant vers moi que j’allais vers eux. Dorénavant, il me faut tout faire. On ne m’accorde plus aucune attention. Je dois me faire remarquer, faire rire, devenir presque exubérante, pour qu’alors j’ai droit à la même place que les autres (je ne parle pas de mes amis). Je suis le bout en train. Les mauvais jours, je me qualifierais presque de "bouffon du roi" : mais attention, je n’ai JAMAIS fait rire à mes dépends !

Pour résumer, instinctivement la société donne plus de qualités à une personne mince qu’à une personne qui ne l’est pas. Mon propos est objectif. J’ai eu à peu près cinq ans pour vérifier mes affirmations et les vivre. En faire l’expérience est extrêmement douloureux. Avoir vu ma place dans la société changer, mes rapports avec les gens évoluer sans que je ne parvienne à enrayer la situation me rendait malade ! J’ai perdu mes repères. J’aurais tout donné. J’étais prête à tout, sauf à la seule chose qui était nécessaire : arrêter de manger. Je ne pouvais pas ou seulement sporadiquement.

La boulimie en mode contrôle


Personne ne le sait. Je fais bonne figure, mais je me déteste. Je me regarde dans un miroir et je ne me reconnais pas. Je suis prisonnière de mon corps. Il m’arrive de me frapper, de me griffer par haine. Plus vicieux, parfois je mange à outrance pour me punir : je crée mon propre enfer.

Je refuse de m’acheter des vêtements, de fréquenter des hommes (pas de SEXE), de partir en vacances, de pratiquer des activités de loisirs, etc. Je m’interdis LA vie. Tout est reporté à après. "Après" signifie quand je serais à nouveau moi : mince et belle. En attendant, je n’existe pas. Et malgré toute cette souffrance, aucun résultat. Parce que la source du problème n’a pas encore été identifiée : je suis bipo. Je mange en réaction au stress. Un stress présent, un stress passé, presque un stress à venir. Je mange parce que je suis hypersensible. Je mange parce que je n’ai pas le moral. Bref, je mange pour les mêmes raisons que beaucoup de gens, mais de manière exponentielle.

Aujourd’hui, depuis un an, je vois la fin du tunnel. Je sais que je suis bipo depuis deux ans. Je suis prise en main. Je suis un traitement. Familièrement, je dis que je "gobe". Et peu importe que je doive "gober" trois ou huit cachets, c’est bien le cadet de mes soucis. La seule chose qui compte est qu’aujourd’hui, mon état se régule. Bien sur, je pense que toute ma vie, il faudra que je fasse attention à mon comportement alimentaire en cas de coup dur car c’est mon refuge. Il y un an, j’ai enfin réussi à perdre plusieurs dizaines de kilos. Je ne vous dirai pas combien, aucunes personnes de mon entourage n’a jamais su quel poids j’ai atteint et je n’ai jamais donné aucune indication pouvant y contribuer. La seule chose qui compte c’est qu’enfin JE M’IDENTIFIE A NOUVEAU A MOI-MEME ! Je SUIS moi au sens plein du terme et enfin je revis ! Trois mots pour définir ce moment : QUE DU BONHEUR !

Tout ça pour ça


Il m’arrive souvent de me demander si j’avais eu la possibilité de choisir mon destin, si je me serais infligée cette épreuve : la bipo, la boulimie qui en découle, les traumatismes qui y sont liés ? J’imagine qu’après la lecture de mon témoignage, vous répondrez immédiatement : "NON.". Cʼétait, moi aussi, ma première réaction. Aujourd’hui, je ne sais pas. J’ai vraiment souffert, le mot est faible, mais en même temps ces épreuves m’ont enrichie. Elles m’ont amenée à m’interroger plus tôt que d’autres sur ce que j’attends de ma vie, ce que je veux en faire. Certains attendent la quarantaine ou la cinquantaine pour faire leur "crise existentielle". J’ai peut-être eu la chance de me poser les bonnes questions plus tôt que d’autres, et d’avoir conscience plus tôt de la valeur de la vie : La vie est un jeu, chaque chose à prendre est bonne, le reste n’est que foutaises.

août 2011


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