Ni folle, ni possédée, juste une cyclothymique qui s’ignorait
31/12/2007
Témoignages > Cyclothymie
Cyclothymique depuis l’enfance ?
Déjà petite je me souviens de moi étant triste. En primaire j’allais me cacher dans les toilettes pour pleurer. Je pensais que personne ne m’aimait, j’avais l’impression d’être différente des autres. Je ne me rappelle plus grand chose avant mes 11 ans, mais de ça je me souviens. Néanmoins, mon père étant pasteur et, étant la ? fille du pasteur ?, beaucoup d’attention était portée sur moi. J’étais le ? chef ? des jeunes de mon âge. Alors qu’à l’école, et avec les enfants du voisinage, c’était l’inverse total. Ma mère m’a parlé de moi étant enfant et me disait que déjà mes humeurs changeaient sans arrêt. Je changeais de tenue plusieurs fois dans la journée, je me déguisais et aussi je pouvais rester aussi des heures et des heures seule dans ma chambre à jouer à la Barbie à tel point que je m’imaginais moi même être une Barbie. Je vivais dans un monde irréel.
Mon adolescence, mes conduites à risque et la suite...
Ensuite, à l’âge de 11 ans, nous sommes venus vivre en France car mon père voulait y fonder une nouvelle église. J’ai très mal vécu ce changement, et j’ai tout de suite commencé à fréquenter les mauvaises personnes. Toujours attirée par les gens plus âgés que moi, droguées, alcooliques, les "racailles". Je ne me sentais à l’aise qu’avec ce genre de personnages. Ils m’acceptaient comme j’étais. Je ne me sentais pas inférieure. Dès l’âge de 11 ans je fumais des joints et buvait à en être totalement inconsciente. A l’âge de 13 ans violée, à l’âge de 15 ans viol collectif, c’était la guerre avec mes parents. Enfant très rebelle, un ? non ? était pour moi inacceptable. Je me souviens de mes crises de nerfs avec ma mère, je cassais tout dans la maison et un jour j’en suis même arrivé à lever la main sur ma mère. Entre 13 et 15 ans je voyais psychologue sur psychologue. Mais rien y faisait. A 16 ans je me suis retrouvée enceinte d’un homme âgé de plus 8 ans. Mon père m’a littéralement jeté à la rue. Prise en charge par un juge pour jeune mineure, j’ai été placé avec ma fille dans plusieurs foyers.
A 17 ans j’ai fait ma première tentative de suicide. Entre 19-23 ans j’ai fais des petits boulots pour survivre (caissière, femme de ménage) et suis restée dans ce train de vie : mauvaises fréquentations, alcool et drogue à gogo. Changeant de partenaire régulièrement, amoureuse un jour, plus amoureuse le lendemain, heureuse, pas heureuse ? à l’âge de 25 ans je me suis finalement mise avec un homme qui semblait beaucoup plus équilibré et stable par rapport à tout ce que j’ai connu. Mais au bout de quelques mois, mon passé a ? ressurgi ?. Je ne dormais plus, cauchemars, crises de nerfs? comme si tous les malheurs, que j’avais fait semblant de ne pas voir pendant toutes ces années, revenaient à la surface. Je ne pensais plus qu’à la mort, la mort, la mort. Ma souffrance était si intense, je voulais en terminer. Des démons dans ma tête, la cogitation 24/24. J’ai commencé à traiter mon compagnon comme un moins que rien, à passer tout mon malheur sur lui. Je lui en voulais presque d’être aussi bien dans sa peau et sans soucis particuliers ? tout le contraire de moi.
Trois hospitalisations psychiatriques pour rien - pire, pour aller plus mal
Cette année-là j’ai passé 3 séjours en clinique psychiatriques, avec changement de traitement tous les mois, j’étais devenu une loque, un vrai zombie. Plus rien ne comptais pour moi. Plus rien. Même ma fille ne comptais plus. Je passais mes journées allongée sur le canapé sans me laver, sans manger, et à contempler le plafond, et cela pendant des mois. A mon troisième séjour en clinique et avec le soutien de ma famille et amis j’ai pu remonter la pente. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé mais je me suis sentie mieux d’un coup, du jour au lendemain j’étais en hypomanie constamment. J’ai recommencé à sortir, j’ai quitté mon gentil partenaire qui à ce moment là me semblait trop calme et rabat joie pour moi. J’allais de partenaire en partenaire, j’ai recommencé à boire, à sortir, il me suffisait de peu de sommeil, j’étais en pleine forme, je ne tenais plus en place. Plus personne ne me reconnaissait. Dépenses à tout va, le danger m’excitait. Mais quelques mois plus tard j’ai à nouveau sombré? je suis tombée à nouveau très très bas. Crises de nerfs à tout casser, crises de larmes tout le temps et n’importe où sans raison précise, me sentit tendue et à bout, palpitations, crises d’angoisse, pessimisme extrême.
Rencontre avec un expert de la bipolarité
Et j’ai rencontré un expert des troubles bipolaires, il y a maintenant 2 ans. C’est là que j’ai découvert la "bipolarité" dont je n’avais jamais entendu parler auparavant. En lisant son livre j’avais l’impression qu’il parlait de moi. J’ai commencé un traitement comprenant du Lithium et d’autres médicaments, je ne me suis pas sentie mieux tout de suite, mais après quelques changements dans mon traitement, je me sentais vraiment une personne nouvelle. Toujours les mêmes symptômes mais beaucoup moins prononcés. Depuis je ne fais plus de crises, je ne créé plus de scandales pendant les "réunions familiales", je suis beaucoup moins irresponsable. Mon anxiété a disparu, mes douleurs de ventre, de dos aussi.
Maintenant
j’ai juste quelques périodes de déprime, et beaucoup de hauts et de bas, des changements d’humeur qui peuvent même changer plusieurs fois dans la journée. Mais c’est beaucoup plus gérable maintenant. Je n’ai plus de périodes d’hypomanies. Je contrôle les choses beaucoup mieux maintenant. Je suis loin d’être bien dans ma tête, les choses sont encore assez confuses, mes réactions des fois questionnables, mais c’est un changement radical. J’ai aussi participé à des réunions de groupe pour les cyclothymiques. C’est formidable de pouvoir rencontrer des gens un peu "comme moi" et de voir qu’on n’est pas seul et d’apprendre ce qu’est vraiment cette maladie. Car c’est une maladie.
Non je ne suis plus folle ni possédée par des démons comme je l’ai tant pensé pendant des années.