12 : La psychoéducation, mon plan de salut
1/01/2009
Témoignages > Cyclothymie > Dear Siobhan
Dans les débuts, nous terminions souvent nos entretiens un peu en demie teinte… Peut-être me fallait-il trop de temps encore pour ramener â la surface, les effluves des râles que je gardais soigneusement enfouis sous un éboulis psycho-hermétique fait de honte et de pudeur mêlées. J’avais du mal â parler et non pas paraître lorsqu’il s’agissait de dévoiler mon dédale intime. Elle me faisait remarquer très gentiment qu’elle était ma thérapeute sous-entendant que cette barrière n’avait pas lieu d’être. Par principe purement thérapique, oui cela allait de soi, mais n’était-il pas vrai également que « nihil est interius mente » et dans notre collaboration l’exercice le plus difficile était d’apprendre â dépasser mes inhibitions et craintes.
Parler, juste révéler avec des mots simples la palette de mes humeurs chamarrées, sans emphases ni allégorie, sans retenue ni pudibonderie de sociabilité. Car il ne s’agissait plus effectivement de paraître ni de me conformer au reflet de l’image que l’on se faisait de moi, en me limitant â donner la réplique appropriée. Je vivais mon quotidien tel le ferait un simple figurant qui n’aurait jamais la moindre notion de l’oeuvre dans laquelle il jouerait, tant-il se serait contenté, concentré, contraint â rester dans le cadre et le bon angle. Par habitude j’en étais capable extérieurement alors que intus in corpore, in pectus, au plus profond, je ne pouvais être autrement que hors champs, hors sujet, hors norme. Mon esprit est ainsi fait, qu’il a constamment besoin de sur amplifier toutes choses. Cela n’est-il pas inhérent â l’ambivalence de l’humeur Bipolaire ?
Elle m’avait d’ailleurs dans la phase d’apprentissage de ma maladie très bien encadré avec un programme de mood monitoring que j’effectuais quotidiennement pendant les 2 premiers mois et amplement documenté de courbes, histogrammes de cycles, des brochures explicatives sur les mécanismes cognitifs et mentaux caractéristiques des personnes qui comme moi souffrent de Cyclothymie. Nous avions mis en lumière mes différents automatismes : le « tout ou rien », la « sur généralisation », « lecture de pensée », le « catastrophisme », la « dévaluation du positif » ou encore le « filtrage » pour ne citer que quelques uns. Autant de conditionnements autodestructeurs qui au de-lâ de la génétique d’où elles tiraient leurs racines étaient aussi nourri par la sève d’une existence émotionnellement chaotique, elles m’avait initié â la notion de Trigger, ces signes révélateurs qui étaient les prémices des épisodes hauts ou bas, dépressifs ou hypomaniaques.
Les identifier afin d’éviter mes schémas catastrophes fuelled de drogue et d’alcool. Je saignais aujourd’hui écorché vif comme Marsyas de mon samsara Sisypheenes qui faisaient de moi un perpétuel looser. Une introspection profonde nous avait fait remonter bien au-delâ de mon dernier déclenchement sous Extasie, avant 2002 années de la naissance de Seymour et de cette crise foudroyante que j’avais faite le mois précédent sa naissance, sondant au plus profond les manifestations du mal.
J’avais retenu de Claude ORSEL ça façon de voir « le sujet en terme de contenant et de contenu. La peau étant le contenant, son effraction faisait issue au sang. Le cerveau était un contenant, la protection qu’offrait le crâne, autre contenant, était insuffisante pour protéger celui ci des effractions sensorielles, émotionnelles traumatisantes dans l’enfance, et certainement dès le premier âge, c’est-â -dire dans la période dite d’amnésie infantile. Pour supporter ces horreurs et ne pas avoir â en parler en vérité, les humains avaient créé les mythes de comportements. Mais le code indispensable â la compréhension du texte et des images s’était perdu, il fallait refaire la trace ». Cette TCC était mon plan de salut, ma démarche analytique, comme il l’écrivait, qui a travers les observations de mes automatismes mentaux, me mènerait avec persévérance, vers l’assimilation de la façon dont ces derniers s’étaient emboîtés les uns dans les autres et de noter lâ où ça ne rentrait pas dans la boite « univers- saine » de la normalité.
Même si la désignation de cette peine a changée, « Bipolaire » est plus facile â porter que « Maniaco-dépressif », il est néanmoins des fois qu’il est préférable de cacher sa maladie, traverser les phases comme on combat les vagues â contre courant en bronchant le moins possible. Je suivais mon rythme hebdomadaire avec câline, les conférences Argos 2001 tous les premiers jeudi du mois, Hantouche tous les 2 mois mais le coeur et l’âme toujours aussi lourds. Il fallait néanmoins en dépits se faire une raison et remettre sans cesse un coup de manivelle pour ranimer une vie tantôt au point mort ou en dangereuses virevoltes incontrôlées.