Chimie et alchimie
31/12/2008
Témoignages > Vécu sous traitement
Ce médicament m’a protégé des crises de manies à des moments critiques de ma vie. Après les douleurs et les appréhensions relatives au démarrage du traitement je fus éperdue de reconnaissance envers mon psychiatre et urgentiste Dr T..
Je précise le terme urgentiste car le fait de savoir qu’il pouvait venir me secourir à toutes heures du jour et de la nuit et ce même à l’étranger me rassura longtemps de la façon la plus forte qu’il soit. Les souffrances psychologiques ayant été insupportables j’étais littéralement terrorisée de leur éventuelles réapparitions.
Bien sûr, cela ne me faisait pas plaisir de me rendre compte que je souffrais d’un trouble de l’humeur et que je devais prendre un traitement sur très long terme : L’accepter, s’accepter me demandait du courage, de l’humilité et une confiance immense en mon médecin, mais au delà de cela il y avait autre chose.
Avec la prise du traitement je me sentais différente. Je n’étais plus vraiment moi même. Des idées noires que je n’avaient jamais eues, une fatigue face à la vie m’envahissaient. Cela ne me ressemblait pas. Je mettais cela sur le compte du contre coup de la bonne nouvelle : malade mentale !
Au fond de moi régnait une immense tristesse et amertume : je ne serai plus jamais celle que j’étais. Mon élan, ma joie de vivre communicative avait disparue. Seuls les rendez-vous bimensuels avec mon psy me mettaient d’humeur festive : bien heureux transferts !
Sitôt sortie du cabinet mon humeur retombée tel un soufflé !
Par une heureuse providence Dr T. a eu l’idée lumineuse d’écrire un livre de poche intitulé "Eloge de la dépression". Bouquin de vulgarisation à la fois très instructif, positif et plein d’humour malgré son titre pompeux et un brin provocateur.
Je me renseignais aussitôt sur le livre en question via internet - en patiente très impatiente de découvrir enfin la pensée de son psychiatre et sauveur bien aimé, quand je lu un commentaire enthousiaste d’une personne que je trouvais d’emblée fort sympathique : Régis Blain.
Via son blog et plus tard le philadelphia project il me conseilla vivement de rencontrer le Dr H. pour un diagnostic plus pointu et éventuellement envisager de réajuster mon dosage afin d’annihiler ma sensation de déprime.
J’hésitais fortement mais Régis finit par me convaincre et je me rendis avec mon époux au CTAH.
Le Dr H., après examen de mon dossier, un long questionnaire écrit (avec une évaluation des tempéraments affectifs, de l’intensité affective, les questionnaires des hypomanies...) et quelques mots, compris mon mal être. Il modifia le traitement en remplaçant un de mes deux cachets de dépakote 250mg que je prenais respectivement le matin et le soir par un demi cachet de Téralithe LP400mg (lithium).
Je sentis le soir même la différence. Je me sentais détendue et plus légère. Pour autant, j’avais très peur : le lithium ayant mauvaise réputation je m’attendais au pire. Pendant les premières prises j’eus le désagréable sensation que ma gorge - au niveau de la pomme d’adam - s’enflait, je ressent ai une gêne. Je pensais aux risques de problèmes sur la thyroïde. Mes avants bras me semblaient s’être refroidis soudainement.
J’écrivis à Régis qui se moqua gentillement de moi et prétendit que je somatisais. Lui, le tout bio, avait un recul éblouissant me concernant !
Malgré tout, sans lui je ne me serais jamais jeté à l’eau. Il avait essayé le lithium pendant trois jours et en avait parlé sur son blog avec beaucoup d’humour.
La vérité est que je me suis retrouvée : Grâce ce réajustement chimique mon caractère est enfin celui que j’ai toujours eu : légèrement hyperthymique. Stable vers le haut. Comme le disait la Mistinguette : "Je suis comme le Bon Dieu m’a faîte et c’est très bien comme cela !"
La gêne au niveau de la gorge s’est estompée mais n’a pas complètement disparue. La sensation de froid au niveau des bras s’est estompée.
Je désespérai qu’un jour enfin je puisse être à nouveau moi même et ce grâce à un tour de chimie.
Je prie de pouvoir supporter ce traitement tant que nécessaire.
Je remercie tous ceux qui m’ont aidé.
Enfin, je souhaite vivement que ceux qui souffrent des troubles de l’humeur gardent l’espoir en un traitement adapté pour les protéger sans les changer ou les abrutir.
Cordialement,
Emilie - Philadelphia Project.
Commentaire CTAH
Le choix du lithium à petite dose a été justifié par deux facteurs :
Le cas d’Emilie est à rapprocher des cas signalés dans un autre post, concernant les "répondeurs rapides" au traitement thymorégulateur à petite dose.