Plus de précisions sur la dichotomie intra-bipolaire
19/10/2010
Auteur : Dr Hantouche
Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Concepts / Classification
(en italique les commentaires dʼAmélie)
1. Les personnalités types qui seraient un trait de la cyclothymie semble entretenir une confusion entre cause et conséquence. La personnalité se construit sur un tempérament. Si celui-ci est instable, cela me parait une cause suffisante pour produire des évitements, du narcissisme...etc. Dʼautre part ces traits de personnalités semblent sʼestomper avec la prise en charge de la cyclo (cf nombreux témoignages sur les forums)
EH : Dans ce post sur la dichotomie intra-bipolaire : la question des personnalités n’a pas lieu dʼêtre : le but de ce travail est de mettre en question la dichotomie faite au sein de la PMD dans les années 60 entre "unipolaires" et "bipolaires" (qui a porté beaucoup de tort à la connaissance de la bipolarité), l’EBF propose de situer la dichotomie au sein de la bipolarité
2.Lien qui persiste encore avec trauma dʼenfance, et notamment abus sexuel.
Ce point est particulièrement épineux, car quand nous parents nous présentons avec un enfant cyclo, cʼest ce point quʼon nous renvoie systématiquement ! Je vous passe les détails des situations ubuesques que cela peut produire. Là encore, ce sont des déclencheurs, et faire un amalgame entre cause et conséquence me parait dangereux, d?autant quʼil existe plein de contre-exemple
EH : L’abus sexuel existe comme tous les stress. Il est impossible que ce stress traumatique soit responsable de la cyclothymie ; mais c’est un facteur déterminant de l’âge de début et de la sévérité de l’évolution du trouble cyclothymique ; donc, ni cause ni conséquence
3. Vouloir séparer BP et Cyclo :
Cette approche sʼéloigne de lʼhumain.
La caractéristique de ce qu?est un humain est globale, et on a passé le cap de se demander si tel type (méditerranéen, asiatique, africain....) était humain ou pas. Il nʼy a pas un oeil pareil que lʼautre, pas une emprunte digitale identique...Pourtant nous faisons tous parti du genre humain. Pour moi il en va de même avec la bipolarité. Ce nʼest pas parce que la cyclo a des caractéristiques propres, quʼelle nʼest pas profondément bipolaire.
EH: L’EBF et moi-même, défenseurs de la place importante de la cyclothymie, n’ont jamais suggéré la séparation entre bipolarité et cyclothymie : la dichotomie intra-bipolaire stipule 2 formes majeures de bipolarité selon le mode évolutif et la dominance du tempérament affectif. Donc, c’est clair, la cyclothymie est un trouble bipolaire.
4. Lʼinstabilité déstabilise.
Jʼai envie de prendre une image : et si la cyclo cʼétait comme le sable... instable, difficilement saisissable... Mais constant dans ses caractéristiques. Cʼest du sable, il prend les formes du contenant, mais il reste du sable. Il se fait balayer, mais reste là. Cʼest lʼenvironnement, récemment instable qui provoque un éparpillement du sable que nous sommes. La seule caractéristique spécifique à la cyclothymie par rapport à la bipolarité classique, c?est lʼinstabilité de base.
EH: L’EBF soutient ce point, comme d’ailleurs Falret qui parlait de "Folie circulaire" et de Hecker, Deny et Kahn qui insistaient sur la notion de ?"constitution spéciale instable avec hypersensibilité morale et affective avec des hypomanies et dépressions intermittentes".
5.Pourquoi vouloir un stéréotype, un genre gravé dans le marbre telle que la BP1.
C?est une approche qui mʼétonne toujours de la part de la médecine, science humaine parait-il. Quoi de moins stéréotypé que lʼhumain ?
EH: On parle de "BP-I" tout simplement parce que lʼentité "BP-II" a été décrite 10 ans plus tard par rapport à la forme clinique avec des accès maniaques. Ce n’est pas un stéréotype mais une évolution historique de la définition moderne de cette maladie à partir des années 60 - qui a été respectée dans les manuels de classification - cʼest un détail de nomenclature - Ce qui est important est de savoir de quoi on parle quand on utilise les termes ˮBP-Iˮ, ˮBP-IIˮ et autres.
Enfin si lʼon met en perspective le soin, et la nécessité de classifier pour activer tel ou tel soin : Nʼest ce pas suffisant la classification actuelle ? Où se situent les échecs de soin, pour avoir besoin de changer la classification ?
Il mʼavait semblé que l’échec était plus sur le diagnostic que sur les thérapies.
EH: Ce point est complexe car il mélange l’essence- même des classifications, la reconnaissance diagnostique puis les thérapies (qui sont plus complexe que la classification de la maladie).
donc en premier, ne pas confondre les 3 niveaux de l’approche clinique ;
En second, établir le diagnostic le plus complet et affiné : là rentre en jeu l’utilité d’une classification qui ne doit jamais être purement nosologique ou théorique mais censée capter la complexité de la maladie bipolaire.
En troisième lieu, une bonne classification doit comporter des implications pratiques comme faciliter la reconnaissance précoce du trouble (notamment dans les formes atypiques ou atténuées), estimer sa sévérité et son potentiel de récurrence, élaborer des soins adaptés à chaque forme (en commençant par la psychoéducation, le choix des molécules, la sélection des doses et des combinaisons entre médicaments et thérapies psychologiques).
Enfin, l’échec ou la réussite d’un traitement ou d’une thérapie ne dépendent jamais de la classification. Le seul mérite d’une classification comme celle de l’EBF est d’insister sur les formes radicalement instables et atypiques qui ne sont pas correctement diagnostiquées et par conséquent très mal soignées par les antidépresseurs ! si l’EBF arrive à faire passer ce message, çà sera une grande victoire !!
Dr Hantouche, CTAH
20 Oct 2010
La dichotomie au sein même de la bipolarité : approche de l’EBF