Aujourdʼhui je suis heureux
10/12/2014
Témoignages > Se soigner
Des émotions apprivoisées
Aujourdʼhui je suis heureux, mais ça nʼa pas toujours été le cas. Et je dois régulièrement veiller à ne pas mettre en péril ce fragile équilibre. Le temps aidant je crois que ça va sʼarranger. Déjà je constate que je suis plus “sage”, cʼest-à-dire que je prends davantage de recul par rapport à ce que je vis, ce que je ressens.
Le problème ce sont mes pensées, lorsquʼelles sʼemballent, elles peuvent me conduire dans des situations extrêmes et dangereuses. Alors jʼai appris et je continue à apprendre à les apprivoiser, à les discipliner. Elles deviennent le siège dʼun véritable cyclone, dans ma tête ça sʼaffole, je me dis que je dois tout changer, tout bouleverser, avec le risque dʼébranler et de faire sʼeffondrer tout ce qui a été construit patiemment mais sûrement.
Paradoxalement, ma chance je la trouve dans le parcours chaotique que jʼai laissé derrière moi (nombreux échecs, projets avortés, dépressions sévères, avant le diagnostic et le lithium), car si jʼai tendance à oublier le fonctionnement de la bipolarité (lorsque je suis stable, je nʼy pense plus), de nombreux indices sont là pour mʼalerter et me remettre en mémoire les schémas de ces cycles avec lesquels je commence à être familier, et là je me dis que je nʼai pas envie de replonger et de me “planter” une nouvelle fois.
Stabilité rime avec monotonie mais aussi « sécurité »
Cʼest vrai que la stabilité ça peut devenir monotone mais jʼai compris que cʼest ma sécurité : être régulier, voilà la clef de mon épanouissement personnel. Savoir se respecter, comprendre comment je fonctionne, comment je réagis, bref me connaître. Je vais encore apprendre à me connaître car la vie ce nʼest pas une autoroute, même si on imagine parfois tout prévoir, tout savoir de ce quʼon peut attendre dʼelle. Elle me réservera des surprises, mais ce qui sera surtout intéressant, ce sera ma réaction. Est-ce que je vais faire confiance aveuglément à mes sentiments, à mon intuition ? Bien sûr, comme à chaque décision importante, je vais douter, être tourmenté, torturé. Il me faudra alors rassembler beaucoup de courage pour interroger cette expérience de vie avec ses cycles infernaux.
Lʼhypomanie cʼest beaucoup dʼexcitation au début dʼun projet, une intense joie (euphorie), le sentiment dʼêtre fort, plus que ne le pensent ceux de mon entourage. Après quelques jours seulement, mon corps reprends le dessus (ou plutôt le dessous !), la fatigue me terrasse, mes capacités qui me paraissaient prodigieuses nʼont bientôt rien à envier à lʼénergie dʼun mollusque.
Cʼest la chute. Je suis monté trop haut, je ne me suis pas méfié. Ou alors je me méfie et là je considère avec prudence ces pensées “grisantes”, car je sais quʼelles sont éphémères. Je dois construire sur du solide, sur quelque chose de stable, sinon cʼest voué à lʼéchec et à la désillusion.
Ma technique maintenant, lorsque vient le fameux “virage” hypomaniaque, cʼest de le transformer en “rond-point” : je fais plusieurs fois le tour de mes pensées, plusieurs jours sʼil le faut, avant de prendre la décision de la direction dans laquelle je mʼengage. Et là je sais que je ne fais pas de bêtises, ma décision est sereine car jʼai évalué objectivement les conséquences quʼelle implique sur mon équilibre.
Vivre cʼest être confronté à de nombreux choix, ne pas se précipiter, cʼest aussi un choix ou un art de vivre.
L’hypomanie selon Marine
01: Faire la part entre moi et la cyclothymie
Fragments de suivi
