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John ou l’addiction aux jeux vidéos on line

27/07/2011
Auteur : Caline Majdalani

Cas cliniques > Etude de cas

Cyclothymie et addiction : que devient la vie sociale du patient ?
août 2011
John a 30 ans. Il est célibataire, sans enfants, vivant en concubinage avec son ami depuis plus de deux ans. Il a travaillé pendant 15 ans en tant que commercial dans le secteur de l’événementiel.

Il a été diagnostiqué cyclothymique depuis quelques mois, sur une base de tempérament irritable, avec une dominante anxio-dépressive.

Ce qui se dégage de son histoire de manière patente est son addiction aux jeux vidéo en ligne. Mais comme beaucoup de patients cyclothymiques, son addiction est multiple. Il est donc également addict â la TV et au cannabis. Il passe plusieurs heures sans discontinuer devant son écran de télévision, passant de chaines en chaines, d’émission â des fils et séries américaines. ? C’est comme un drogue ?, affirme-t-il, ? je ne peux pas m’arrêter ?, ? je suis comme happé â la télé ?. ? Pour moi, c’est comme un compagnon dont je ne peux me séparer et qui m’accompagne dès les premières heures matinales. Mon amie part travailler et moi je rejoins cet ami fidèle, ma télé. Pour éviter de ruminer je fume un joint. Ca me permet de me détendre et d’éviter â mon angoisse de pointer son nez. Je ne pense plus du tout, ce qui est très agréable.

John est au chômage depuis plus de trois ans, en raison d’un licenciement professionnel. La raison évoquée par son patron est la non réalisation de ses objectifs de vente (qui correspondent â un montant mensuel très défini). En réalité, John connaissait de longues périodes dépressives très dominées par une humeur irritable, une absence totale de motivation ainsi qu’une baisse fulgurante d’une estime de soi, qu’il avait avec le temps du mal â gérer et â camoufler â son entourage. Les antidépresseurs n’étaient plus efficaces et ses états devenaient de plus en plus source d’une douleur morale insurmontable.

Il a commencé â fumer du cannabis vers l’âge de 14 ans, dans un premier temps pour réussir â dormir le soir. Avec le temps, son besoin a augmenté et sa consommation s’est étalée dans la journée. Les cannabinoïdes ont d’abord été utilisés comme un somnifère, puis comme un anxiolytique, puis comme un antidépresseur, ? qui au moins abrutit l’esprit tourmenté et en souffrance ?.

? L’après-midi, pour me divertir et apporter un peu de peps â ma vie, je retrouve mes amis en ligne pour jouer â la PSP. Ce sont des personnes que je ne connais pas personnellement mais avec qui je discute grâce â un micro et avec qui je constitue une équipe ?. C’est ainsi parti pour plusieurs heures. ? Je perds complètement la notion du temps. Je suis excité et je sens que mes journées prennent un sens. Je ne me sens pas complètement â l’écart de la société. J’ai des amis virtuels certes mais des amis quand même ?. Le sentiment de solitude que ressent John est ainsi dilué dans un faux semblant de relation sociale et dans un simulacre d’intégration.

? Le soir, mon ami rentre et m’arrache â mon jeu ?. Cela engendre souvent des conflits car souvent le compagnon ne comprend pas l’attitude de son conjoint et minimise voire fait tomber l’addiction sous le joug du déni. ? Une fois mon ami couché, je retrouve une communauté de copains virtuels pour un autre jeu ?. ? Echapper â une réalité que je trouve insupportable ? est la raison de cette addiction. Or le faussé ne fait que se creuser. Heureusement que John a fini par consulter un psychiatre qui a réussi â briser le cercle vicieux de l’addiction qui cachait un trouble cyclothymique carabiné. Il est actuellement suivi en psychothérapie.