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L’erreur diagnostique entre TOC et dépression mixte

18/09/2010

Cas cliniques > Diagnostics difficiles

Cet article explique la différence entre les obsessions des TOC et les obsessions que l’on trouve que certains dépressifs (excitation mentale) bipolaires.
Il arrive souvent que des patients viennent nous voir pour ce qu’ils pensent être des TOC : ils ont des pensées très envahissantes, qui les martèlent sans cesse, avec une forte angoisse. Il y a clairement ce qu’on appelle des obsessions. Par contre, contrairement aux autres personnes souffrant de TOC, ils n’ont pas un scénario catastrophe très clair ni de rituels précis. Cela ressemble â un bombardement de pensées floues et continues, un enlisement sur une pensée en boucle, et non â une obsession construite avec de l’angoisse et des rituels pour se rassurer d’un danger probable.

Et cette erreur de départ peut entrainer un mauvais diagnostic et donc des années de mauvais traitement médicamenteux. En effet, la dépression mixte s’aggrave sous antidépresseurs. Elle fait partie des troubles bipolaires, et nécessite un traitement par thymorégulateurs.

Pour rappel :
- Un TOC : la personne est envahie par une pensée de catastrophe, ou de maladie, ou de saleté, ou sexuelle, ou de faire du mal, etc, construite sur des ? et si ?. Elle est bombardée sans cesse, avec une forte angoisse, et provoque des rituels précis (lavages, symétrie, vérifications, répétitions, ruminations, ?) pour tenter d’écarter le danger et diminuer l’angoisse. Un TOC commence le plus souvent dans l’enfance ou l’adolescence, ou chez certaines femmes après un accouchement. Les TOC répondent bien aux antidépresseurs.
- Une dépression mixte est une dépression (tristesse, manque d’envie, vide intérieur, fatigue) mélangée â un côté volcanique, bouillonnant et impulsif dans le corps et/ou la tête, comme une énergie qui pousse de l’intérieur (ce qui est paradoxal avec le côté vide et sans énergie d’une dépression classique) et provoque une pile électrique dans la tête. La dépression mixte peut arriver â tout âge, mais le plus souvent les personnes souffrant de dépression mixte racontent que leurs obsessions sont arrivées â plus de 40 ans.

Il arrive que certaines personnes aient des TOC et aussi une dépression mixte. Ce sont de vrais TOC car ils ont un scénario clair et des rituels bien définis mais il sera néanmoins nécessaire de prendre en compte la dépression mixte qui est en parallèle car l’agitation cérébrale de celle-ci alimente les TOC.

Voici deux cas de dépression mixte, avec les éléments principaux soulignés :

Cas 1 :
Madame xxx décrit un surmenage professionnel qui a abouti â une invalidité, des crises de spasmophilie durant deux ans, et de graves problèmes physiques qui l’ont épuisé. Les fortes douleurs entraînent une phase d’excitation et d’hyperactivité durant 3 mois avec euphorie, irritabilité, diminution du besoin de fatigue, augmentation du débit de parole et hyperactivité. Cette phase aurait abouti â un placement en maison de repos.

Quelques mois après, des obsessions apparaissent sur la peur ? de perdre ses mains ?, juste après une crise de spasmophilie. Madame xxx a beaucoup de mal â expliquer cette obsession. Elle a l’impression de ne plus sentir ses mains, comme si des sensations avaient disparu, ou étaient différentes, mais ne peut clairement l’expliquer. Elle les regarde sans cesse, dans tous les sens, et semble presque incapable de les poser tranquillement sur ses genoux, comme si les regarder pouvait changer quelque chose â la catastrophe : ? Je les analyse sans cesse. ? Madame xxxx reconnaît l’absurdité de ses pensées, mais l’angoisse due aux sensations lui parait inexplicable et terrifiante. Cela l’envahit toute la journée, elle ne fait qu’y penser. Elle n’a pas de rituel clair, et ne sait même pas ce qui pourrait la rassurer.

Des examens neurologiques ont été faits, ainsi qu’une ponction lombaire, mais tout semble normal. Une dépression mixte est trouvée avec une grande tristesse, un manque d’envie, un mauvais appétit, des insomnies, une grande agitation dans le corps et l’esprit, des difficultés de concentration, et une forte impulsivité avec de la violence physique retournée sur soi. La fille de la patiente se dit avoir été choquée de voir sa mère se frotter jusqu’au sang ? comme si elle était devenue hystérique ?, ce qui a entraîné une hospitalisation en psychiatrie.

Cas 2 :

Madame xxxx consulte â ce jour pour évaluation d’obsessions continuelles.

Les obsessions se seraient développées â 45 ans alors que j’étais aux USA. J’étais mal, déprimée, et sans savoir pourquoi j’ai pris des choses dans un magasin sans payer, comme une impulsion incontrôlable. Et j’ai développé des ruminations sur cela, sur pourquoi j’ai fait cela. Ce sont des histoires qui défilent sans cesse, avec tout ce qui tourne autour. C’est très confus car ce sont des flashbacks permanents. Dés que j’en parle cela me refait déprimer, et ca tourne toute la journée. Quand je n’ai pas la réponse je m’effondre, sans même savoir ce que j’attends comme réponse. C’est de la remémoration sans savoir ce que je cherche car il n’est même pas question de réassurance ?. Madame xxx a de fortes angoisses dans les magasins car cela reprovoque des obsessions sur les USA.

Madame xxxx décrit un ? tempérament mélancolique de base ? depuis l’enfance, sans aucun déclencheur. Une première dépression aurait duré plusieurs semaines après le premier accouchement â 30 ans. Une seconde dépression est décrite â 45 ans, aux USA, renforcée par la culpabilité d’avoir pris des choses dans un magasin. Cette dépression aurait duré plusieurs années et se serait enchainée avec une troisième â 48 ans en raison des soucis professionnels du mari de Madame xxxx. Madame xxxx se sent triste, déprimée, fatiguée, avec des variations de l’appétit, insomnies, difficultés de concentration, ralentissement, agitation cérébrale, autodévalorisation, idées noires, phases volcaniques et impulsives en dépression, irritabilité, crises d’angoisse, isolement, dépenses d’argent. L’Effexor aurait aggravé la dépression. ? Les antidépresseurs aident quelques mois puis ce sont comme des bonbons ?. Seropram aurait eu un bon effet. Seroplex, Effexor, Zoloft, Zoloft +Abilify auraient un effet court.

novembre 2012