Bipolarité : les raisons de la résistance
La notion de « résistance » nʼest jamais naturelle, car elle renvoie à un échec dʼamélioration du trouble avec un traitement (ou une thérapie) spécifique, par exemple « manie résistante au lithium », « dépression bipolaire résistante à une combinaison de lithium + antidépresseur » ou « échec de stabilisation avec un traitement régulateur au long cours »…
On est actuellement assez loin des beaux jours où le diagnostic de bipolarité signifiait prescription de lithium avec la garantie de réponse spectaculaire à court et terme au long cours. En effet, 100% des cas soignés par Cade dans les années 40, étaient améliorés avec le lithium, prescrit aux doses presque toxiques ! De même le Dr Bertagna qui a introduit le lithium en France dans les années 70 observait un taux similaire de réponse positive au lithium.
Depuis environ 4 milliards dʼannées, le lithium est sur Terre et depuis 60 ans, le lithium est utilisé en psychiatrie. Après une longue période où le lithium a été négligé ou oublié par les psychiatres, de nouveau, il est considéré comme le « gold standard » du traitement de la bipolarité.
Cela dit, le lithium nʼa pas changé, mais les conceptions de la maladie bipolaires ont évolué au-delà de la conception typiquement kraepelinienne (forme maniaco-dépressive épisodique : épisodes typiques de Manie alternés avec épisodes de mélancolie et des intervalles libres ou lucides). On sait avec le recul que cette forme de BP répond le mieux au
lithium.
Alors que dire des autres formes qui sont incluses dans le spectre élargi de bipolarité :
formes schizo-bipolairesformes de bipolarité tempéramentale ou cyclothymiquesformes à début très précoce (pré-pubertaires)formes de bipolarité discrète (sans épisodes de manie ou hypomanie), dites « dépressions à potentialité bipolaire »formes fortement liées à un abus de substances comme lʼalcool et les –psychostimulantsQuand on regarde la bipolarité à travers ce spectre, il est normal de prédire que le lithium soit incapable dʼassurer une efficacité constante dans toutes ces présentations cliniques – donc peut-on parler de « résistance naturelle » ou anticipée au lithium ? Pourquoi pas !
Cela dit, on dispose actuellement dʼun arsenal de psychotropes qui sʼenrichit progressivement pour mieux soigner lʼensemble de ces formes atypiques ou complexes de bipolarité.