Association CTAH-Recherche

Cas cliniques

Catégories

Diagnostics difficiles

Etude de cas

Traitement / prise en charge

Sous-catégories

Documents

Lithium, un homme venu d’ailleurs ?

24/05/2012

Cas cliniques > Etude de cas

Ce que le lithium a changé dans ma vie
Téralithe LP 400 !
un nom barbare ? Un homme venu dʼailleurs ?
Non ! Mon amoureux.
Un jour, un ex (un de plus) me disait que le véritable amour est celui non pas qui partage un bout dʼexistence mais celui qui révèle.

Mon révélateur, cʼest téralithe lp400, mon compagnon depuis maintenant 4 mois et demi. On sʼest rencontré à Paris (ville des amoureux), rue de Rennes, dans le salon (cʼest mieux que cabinet médical !) du Dr H - Un endroit qui respire le calme et la tranquillité.
Enfin un endroit où il nʼy a pas de blouse blanche, un endroit qui ne paraît pas médicalisé, un endroit où ne vous traitera pas de folle, dʼhystérique, de capricieuse, de pauvre fille, et de tous les noms dʼoiseaux qui vont avec.
En fin un endroit où vous ne vous sentez pas obligé de coller au moule de la société pour éviter tout jugement. Enfin un endroit où on peut être simplement soi parce que ce docteur vous connaît déjà.

Pour la première fois, vous avez face à vous une personne qui semble vous connaître sur le bout des doigts, dans vos réactions, vos sensibilités, vos passages à vide, vos passages à lʼacte, vos rapports avec le monde extérieur, vos rapports avec la connaissance , vos excès ... Cʼest tellement bizarre. Pour la première fois de ma vie je me sens toute nue !
Moi qui essaye depuis tant dʼannée de me faire entendre par mes proches.
Cʼest fait et en un temps record.

Étape 1 : prise de conscience : je suis normale (ou presque). Cʼest fait
Etape 2 : quʼest ce que je peux faire pour aller mieux ?

Je suis assise face à lui. Il me parle, mʼexplique tous les mécanismes de la cyclo et me donne un conseil médical « il vous faut un mec ». « mais », parce quʼil y a un mais « pas nʼimporte quel mec ».
Un qui vous tire vers le haut quand vous êtes en bas
Un qui saura vous écouter
Un qui saura être là.
Un qui sera disponible pour vous

Je me souviens en avoir beaucoup ri, avoir plaisanté sur la liste des patients quʼil voyait et lui avoir suggéré de me placarder sur son mur avec la pastille « contrôlé par la Dr H »
Dʼabord, cʼest un conseil médical qui est un peu hors norme
Ensuite, parce que toutes mes relations sont loin de ces pré requis, en général des gens mariés qui promettent le divorce, des gens débordés, des gens qui ne me mʼécoutent jamais, des gens qui ne sʼintéressent que bien peu à ma tête, à ce quʼil y a dedans, à mes émotions (elles sont décuplées), à mes sentiments (ils sont puissance 10)

Mais Téralithe, il est différent.
Tous les matins, il prend son déjeuner avec moi
Dans la journée, il mʼaccompagne
Dans la journée, il me stimule. Jʼai le cerveau en ébullition, mais une ébullition saine qui me fait carburer dans le travail.
Mais tout nʼest pas simple, comme dans toute relation, il faut des efforts réciproques.
Téralithe nʼest pas tout puissant, il mʼaide, me guide, me protège mais à moi aussi de faire les efforts nécessaires, à moi de comprendre le fonctionnement, les mécanismes et surtout de détecter quand la rechute pointe son nez
Un travail long, pas toujours plaisant car il faut faire des choix mais tellement salvateur.
Enfin, la paix !
Ce mot nʼest pas dit à la légère.
La paix ! Cʼest quand les combats dʼune vie sʼarrêtent enfin.

Quand je regarde en arrière, tout dʼun coup, jʼai lʼimpression dʼêtre grande, jʼai lʼimpression de me trouver, jʼai lʼimpression que je peux enfin expliquer aux autres mes attentes, mes envies, tout simplement parler sans avoir les sanglots qui montent; sans cette hypersensibilité que lʼon se traine depuis toujours, jʼai lʼimpression que mon cerveau est sans limite ;
Je peux enfin parler sans crainte dʼêtre jugée, sans me rendre malade parce que je vais être jugée, en arrêtant de me projeter dans leur tête.
Je peux enfin mʼériger face aux gens et leur dire ce que je me tais depuis plus de 30 ans
ça rend léger, ça rend paisible.
Je ne sais pas si cʼest le bonheur, en tout cas, cette sensation nouvelle est bien agréable.

Téralithe ne mʼa pas changée, je suis toujours moi mais juste moi !
Je suis moi avec la maitrise du moi, moi sans les excès destructeurs, moi avec mes valeurs, mon humour, mes croyances, mes envies.
JUSTE MOI !
Plus de colère injustifiée, plus de crise, plus de tentative vaine de suicide, plus de mélancolie, tristesse et déprime, plus de scarification et sévices en tout genre
Tout ça nʼarrive pas en un jour ni même tout seul, cʼest un travail de tous les jours et à deux, oui ! Lui et moi.
Cʼest surement idiot de le personnifier, moi ça mʼamuse et je me moque de ce que lʼon peut en penser. Cʼest le seul intervenant du monde extérieur qui ait autant changé ma vision sur la vie

Il y a 9 mois, jʼétais à lʼhôpital après un énième pétage de plomb, après une tentative de suicide, avec les bras lacérés de partout
Il y a 9 mois, jʼallais 3 fois par semaine en haut des ponts en me demandant si cʼétait le moment de sauter. J’errai la nuit, les insomnies paranoïaques sont atroces, et jʼatterrissais au dessus de la seine.
Il y a 9 mois, jʼétais malheureuse dans une relation, jʼétais malheureuse de voir tant dʼannées perdues dans ces relations à espérer que lʼon me donne une place, à espérer être protégée, accompagnée, tout simplement aimée.
Il y a 9 mois, je buvais pour oublier toute cette existence malheureuse, pour mʼamuser, sans raison
Il y a 9 mois, on mʼavait convaincu que jʼétais névrosée, folle, sans aucun intérêt si ce nʼest de servir les autres pour justifier ma place
Il y a 9 mois, je passai du rire au larme, du calme à la tempête, de la déprime à 100 000 volts de façon déconcertante.
Il y a 9 mois, ma tête était devenue une cocotte minute. Trop de mémoire, trop de films en boucle, trop de paranoïa, trop de violence

Du plus loin que je me souvienne, ma vie a été en rythme, cyclique !!!!
Une vie ou des vies vécues en si peu dʼannées : mariage, divorce, enfant, études, métiers, expériences diverses, relations vouées à lʼéchec, connaissance, culpabilité, tenter de trouver sa place…
35 ans à ce rythme, ça enrichit mais ça use. Ça précipite la chute
Une dernière relation, encore des expériences qui vous pousse loin, trop loin surement et cʼest la chute.
Vous commencez à perdre pied: alcool, substance, même vos enfants vous fuient.
Alors quʼavant vous repartiez de plus belle dans vos expériences et découvertes de la vie, là vous nʼy arrivez plus. Les crises sont de plus en plus rapprochées, vous en souffrez de plus en plus, vous faites souffrir les autres, ça rend malheureux
Vous devenez violente alors que vous pouvez être si douce
Il est temps de réagir. Dans un dernier souffle vous prenez des mesures temporaires pour vos enfants, des mesures nécessaires à votre rétablissement
Vous décrochez le téléphone et vous appelez le CTAH
Il y a 5 mois, jʼai poussé la porte.
Une chance, ce jour là, jʼétais bien. Jʼai pu débiter toutes les stupidités de ma vie sans rechigner, sans réfléchir.
Ce premier RDV ne sert quʼà poser un diagnostic
Pour moi, il sert aussi à se poser. En sortant du cabinet, je venais de réaliser quʼen me soignant, ma vie toute entière pouvais changer.
Ca fait peur. Je ne voulais pas changer ma personne, juste les excès devenus destructeurs.
Le second RDV nʼa jamais failli arriver.
Un mois plus tard, après hésitation, je repousse la porte
La secrétaire a effacé mon RDV par erreur.

Je repars en me jurant de ne plus revenir. Pourtant, lʼenvie dʼaller mieux lʼa emporté puisquʼune semaine plus tard, je suis assise dans le fauteuil face au Dr H.
Je parle peu. Il a mon dossier, mes récits mais il y fait très peu référence. On sʼen passe. Ce que jʼai pu décrire, il a lu tant de fois quʼil lʼa connait par cœur cette maladie de lʼexcès, des cycles, de lʼautodestruction.
Après une discussion qui se veut rassurante et qui lʼest, je lui fait confiance avec une facilité déconcertante.
Je ressors de son bureau avec pour seule prescription : Téralithe à micro dose.
Moi qui suis toujours dans lʼexcès, je vais avoir du mal à le prendre ce traitement.

Le Dr mʼa prévenu, il ne sʼagit pas dʼun médicament miracle, il faut attendre la période de stabilisation, minimum 6 mois;
Que néni ! PAS MOI ! Je suis sûre que ça va marcher dès le premier comprimé. Il le faut.
Je mʼen persuade tellement que les premiers jours, ça fonctionne.
Lʼeuphorie dʼune nouvelle relation !
Très vite, je retombe. Comme si cette relation nʼétait quʼun leurre pour oublier le passé.
Je tombe bas, je tombe dans des périodes de déprime extrême. Les excès ont disparu, ces excès qui faisaient que jʼarrivais à apprécier un peu la vie, ces excès qui me faisaient supporter cette existence,
Ces excès avec cette adrénaline.
Je veux pourtant croire que ça va marcher pour moi, je veux croire en cette relation avec Téralithe.
Comme toute relation nʼest jamais parfaite, il faut surement la pigmenter.

Excessive et inconséquente, je décide de doubler les doses.
Un ménage à trois nʼest jamais bon.
Vous le faites et vous culpabilisez.
La culpabilité, si forte chez moi, ce sentiment qui ne vous quitte pas depuis que vous êtes enfant, cette culpabilité qui vous entraine si bas, qui vous donne tristesse, mélancolie, qui vous fait détester la vie, qui vous fait vous détester.
Cette culpabilité qui vous entraîne dans une énième crise.
Elles sont si fortes, encore plus depuis que vous prenez ce traitement.
Vous nʼen pouvez plus.
Téralithe vous a fait rentrer dans les rangs, il vous a supprimé tous vos excès mais en échange, il ne vous donne rien. Vous vous sentez si vide. Vous ne trouvez pas votre compte dans cette relation.

On est loin des strass, on est loin des belles promesses dʼune relation exaltante.
Désillusion totale.
Vous rompez avec Téralithe, vous balancez tout. Vous êtes maintenant seule, comme depuis tant dʼannées.
Seule sans personne à qui se confier, seule sans personne qui vous dit que vous faites la plus grosse connerie de votre existence

La dernière crise a été terrible.
3 jours enfermés chez moi
3 jours où jʼai tout laissé tombé, boulot, enfants, existence
3 jours où je nʼai fait que pleurer, 3 jours de spasmes, de crises dʼangoisses
3 jours où jʼai baissé les bras
3 jours où je voulais que la mort mʼemporte
3 jours où jʼai vu ma vie défiler.

Un dernier souffle, une pensée sur ce quʼaurait pu être la vie si j ʼavais essayé une dernière fois. Mes valeurs, mes conceptions de la vie me rattrapent.
Une relation nʼest pas faite pour durer toute une vie. Une relation cʼest partager un bout dʼexistence, cʼest vivre, apprécier le temps qui passe, cʼest se donner lʼenvie dʼavancer mutuellement.

Je me sors de ma léthargie, me traine jusquʼà la douche.
3 jours sans manger sans presque boire, cʼest dur.
Dans un dernier espoir, jʼy arrive.
Jʼavale mon comprimé, juste un.
Je repense au Dr, « il faut du temps pour que ça fonctionne ». Après tout, dans une relation naissante, il faut apprendre à se connaître.


Les jours passent, je me sens différente. Jʼai accepté de donner du temps au temps, jʼai accepté de voir Téralithe non comme un sauveur mais comme un protecteur. Il me protège de moi, il me fait me connaître.
Le Dr H. au cours de nos discussions, lʼavait comparé à un airbag !
Je ne déprime plus, je me prends en main maintenant, je mʼimpose un rythme de vie, une hygiène et même quand ça nʼira pas, je me fais la promesse de garder ces quelques règles, moi qui nʼen nʼai jamais eu.

Je dois dormir, sommeil ou pas. Dans une relation, le lit est surement lʼendroit le plus important pour se retrouver. Jʼapprends à ne plus avoir peur dʼaller au lit, jʼapprends à ne plus le considérer comme une perte de temps, moi qui ai tant de choses à faire, à apprendre, à lire, à connaître.
Je dois manger : je dois arrêter de ne pas manger pendant 3 jours et ensuite de dévorer tout pendant 3 jours. Les repas sont aussi un moment important dans une relation. Je mʼimpose au moins un repas par jour.

Le stress : je commence à comprendre que le stress, le manque de sommeil, est un déclencheur de crise. Je dois le fuir. Le Dr, toujours lʼair de rien, au détour de notre conversation, mʼa dit de prendre du temps pour moi.
Je nʼai pas compris. Je ne sais dʼailleurs pas le faire. Moi qui donne mon temps et mon attention aux autres depuis que je suis née, moi qui culpabilise tant dès que je mʼoctroie un plaisir.
Il a raison, une relation qui dure est une relation où on entretien le plaisir, où lʼon se montre aussi sous son meilleur jour ou lʼon se pare pour plaire à lʼautre et lui donner envie de rester avec nous.

Je vais apprendre et peu importe si je perds du temps, si jʼen donne un peu mois aux autres. Il vaut mieux en donner moins mais de meilleure qualité, je vais aussi apprendre.
Je teste la manucure, le coiffeur, les massages, je vais jusquʼà mʼoctroyer 3 jours de vacances avec ma fille.
Ca fait rire, mais 3 jours cʼest beaucoup quand depuis tant dʼannées, on ne sʼest même pas accordé un jour. Je me sens de mieux en mieux.
Jʼapprends à me connaître et surtout je surveille toute manifestation de mauvais stress, celui qui peut déclencher une crise.

Cʼest dur, ça passe par des choix, des choix de se séparer des gens.
Cʼest très dur parce que vous les aimez mais ils ne vous aiment pas suffisamment pour vous protéger de vous, pour vous protégez des rechutes.
Dʼailleurs, ils vous rappellent sans arrêt vos crises, le passé, vos excès. On a lʼimpression quʼils ne voient pas les efforts de tous les jours, les changements.
Surement quʼils vous préférez quand vous alliez mal, ça donnait des excuses pour ne pas avancer ensemble, ça justifiait leurs agissements, leurs excuses.
Maintenant, vous voyez les choses différemment. Vous êtes toujours vous, vous êtes seulement vous, gentille, attentionnée, et capable de dire vos attentes, capable enfin dʼexpliquer ce dont vous avez envie et capable de dire non ! Non, vous nʼavez pas à tout supporter sous prétexte que vous leur faites la misère au quotidien.
Ce nʼest plus vrai. Vous les avez surement fait souffrir mais vous leur avait aussi donné du bonheur. On ne peut pas vous reprocher ces périodes tout le restant de votre vie.
Maintenant, vous leur proposez et donnez du bonheur, avec les aléas de la vie, mais sans crise. Vous nʼaccepterez plus les concessions à sens unique, on ne vous fera plus culpabiliser en vous rappelant vos crises de tous les jours, elles sont finies !
Vous êtes mieux, en enlevant toutes ces crises, tout ce stress, vous vous concentrez sur lʼessentiel, le cerveau carbure et non plus en période de pic, mais tout le temps, cʼest formidable !
Attention : il faut savoir se reposer et ménager ce nouvel état.
Il est fragile, vous le savez.

Il faut aussi accepter de ne pas être au top tout le temps
Le cerveau en ébullition fatigue un vrai tourbillon, vous montez encore plus en complexité. La vie nʼest pas sans problème, il faut faire avec.
Téralithe vous a simplement donné votre mode dʼemploi sans altérer vos valeurs, vos jugements, vos compétences. Il vous a rendu meilleur, plus fort et plus serein !

Quoi quʼil arrive, vous le garderez dans vos meilleurs souvenirs.
La route est longue, les efforts : quotidiens, et vous savez que la gestion du quotidien (manger, dormir, faire le ménage, payer ses factures, faire les courses, faire des projets…) est surement la chose la plus difficile pour vous mais la clé du succès.

Téralithe : MERCI !

A son entremetteur, à celui qui mʼa fait le rencontrer : DOUBLEMENT MERCI
En espérant quʼun jour je puisse dire « merci la vie ! »

Commentaire CTAH


Bilan clinique nettement en faveur d’une cyclothymie sévère (score de 20/21) avec épisodes hypomaniaques assez récurrents et intenses (score 19/20 sur la check-list d’hypomanie), c’est la présence de traits hyperthymiques (score 15/21) et le souci de la patiente d’avoir un seul traitement, la décision a été de prescrire le lithium à 200 mg puis à 400 mg un mois plus tard en raison d’une réponse très positive et rapide avec la dose initiale.
L’effet positif du lithium se maintient après 15 mois de suivi - avec la même dose de 400 mg ! Effet confirmé sur la disparition des pics circulaires des émotions et de l’énergie – la disparition des épisodes avec pulsions suicidaires - ainsi que sur le changement radical du style de vie.

Il est important de signaler qu’avant le début du lithium, la patiente avait observé une accentuation de son instabilité thymique depuis un an, avec une forte irritabilité et une tendance à exploser et des réactions violentes et impulsives (se dit dangereuse pour elle et pour les autres). Survenue récente d’épisodes avec des idées suicidaires et deux tentatives.
Depuis plusieurs années, on retrouve une tendance à l’abus excessif intermittent d’alcool, une addiction au tabac (trois paquets par jour), des éléments d’agoraphobie et de TOC modéré (vérifications et pensées superstitieuses, des manies de rangement et d’ordre). Enfin, une histoire familiale chargée de troubles avec des addictions, des dérèglements thymiques (dépression, instabilité)

juillet 2012