Louis 12 ans, je veux me suicider
2/11/2011
Auteur : Dr Hantouche
Cas cliniques > Etude de cas
Quand Louis, un jeune et timide garçon de 12 ans, sʼest présenté en consultation, jʼai été très touchée par son histoire, par sa pudeur émotionnelle, et par lʼintensité et la durée de son désarroi face à un désir de suicide quʼil porte en lui depuis au moins 3 ans (et qui grandit avec lui).
Ci-dessous son évaluation psychologique qui tient compte des différentes polarités de lʼhumeur et non pas seulement de symptômes dépressifs purs. Comme il est connu que jusqu’à 90% des suicidants présentent une forme de pathologie psychiatrique sévère (dépression, psychose, trouble de la personnalité), cette évaluation est cruciale et déterminera les soins à suivre. Même si le traitement psychopharmacologique de la dépression bipolaire est complexe, difficile et ne fait pas l’objet à l’heure actuelle d’un consensus clairement établi, il est primordial pour diminuer l’idéation et le risque suicidaire de tenir comte de lʼensemble de la symptomatologie inhérente au trouble bipolaire juvénile (en particulier l’impulsivité et les oscillations de l’humeur) pour la mise en place dʼun traitement qui favoriserait une amélioration des symptômes significative et bénéfique pour le patient. Les antidépresseurs ne doivent jamais être utilisés en monothérapie dans la phase dépressive de la BPJ, mais uniquement en traitement combiné avec des stabilisateurs de l’humeur ou des neuroleptiques atypiques.
Benjamin dʼune fratrie de 3 enfants dans une famille recomposée, en classe de 5ème, il présente, depuis un mois, un état dépressif majeur de type mixte source dʼune grande souffrance, quʼil nʼexprime dans sa grande réserve, nʼexprime que par parcimonie. Cet épisode est principalement caractérisé par :
Lʼhistoire de son trouble de lʼhumeur
Depuis environ 4 à 5 ans, Louis décrit des variations dʼhumeur marquées quasi quotidiennes « je connais des hauts et des bas (…), des jours où je rigole pour rien pendant des heures, sans pouvoir mʼarrêter et dʼautres où rien ne me plaît, où jʼai envie de me vautrer dans mon lit et de ne plus jamais en ressortir ».
Louis décrit des périodes légèrement hypomaniaques qui interviennent sans déclencheur spécifique. Elles sont principalement composée dʼune majoration de lʼénergie « qui me permet de faire plein de choses que jʼaime, dʼune jovialité intense mais non excessive, dʼune accélération mentale et capacités intellectuelles exacerbées. Elles durent entre un jour et 3 à 4 jours.
Ces périodes alternent avec des périodes dépressives de type mixte (minimum 2 jours ; maximum 5 jours) qui prédominent le tableau thymique, depuis notamment deux ans. Elles sont principalement caractérisées par une tristesse, fatigue, des « envies de suicide » et « une fixation sur le fait de me faire du mal : je cours jusquʼà épuisement, jusquʼà ce que je ressente de la douleur physique.
Ces oscillations sont ponctuées de colère (2 à 3 fois/semaine actuellement) non explosives mais qui peuvent se traduire par une expressivité émotionnelle du type agressivité verbale.
Antécédents de thérapies
Il est à noter que Louis a déjà consulté plusieurs psychologues :
Au niveau du tempérament affectif
De nature émotionnelle instable, Louis décrit un tempérament cyclothymique patent avec intensité (dans le vécu extrême des émotions, mais également dans la passion quʼil voue au badminton), impulsivité périodique, hypersensibilité au regard de lʼautre En revanche, il est accompagné dʼune grande inhibition affective (« je garde toutes les émotions pour moi » sous-tendue par une timidité extrême et une grande pudeur émotionnelle.
Par ailleurs, les antécédents familiaux révèlent :
