Les Médicaments pour traiter le TOC
26/10/2012
Auteur : Dr Hantouche
Anxiété / TOC > Techniques pour lutter contre les TOC
Très vite, la clomipramine (Anafranil®) puis les inhibiteurs sélectifs de recapture de sérotonine (ISRS, comme Prozac®, Deroxat®, Floxyfral®, Zoloft®, Seroplex®) ont démontré leur efficacité dans le traitement du TOC. Toutefois, après une certaine phase de « gloire » pharmacologique, on constate que le pourcentage des patients résistants n’est point négligeable, voir même plus importante que celle des répondeurs.
Une enquête réalisée en France (« TOC et ROC », Hantouche et Demonfaucon, 2008), a montré que seulement 25% des patients souffrant de TOC se considéraient comme « bons répondeurs » aux traitements.
Notre expérience avec des centaines de patients confirme la nécessité de réaliser de manière systématique un bilan clinique détaillé avant de choisir la stratégie thérapeutique. Ce bilan comporte :
L’analyse détaillée des ces éléments permet donc d’obtenir les repères pour des choix pharmacologiques à adapter au plus près des cibles cliniques.
En effet, on accepte qu’il existe trois cibles neurochimiques pour traiter le TOC :
De plus, le traitement pharmacologique du TOC doit être guidé par un plan thérapeutique :
Ainsi, il est courant d’avoir recours à des combinaisons médicamenteuses telles :
En regardant les dernières publications de la littérature concernant les traitements du TOC, on peut retenir :
- l’équivalence du Risperdal® par rapport à Abilify® et Haldol® (ces 3
psychotropes sont excellents pour traiter le syndrome de Tourette)
Plus intéressant est de lier le succès de cette stratégie avec le nombre élevé des obsessions et compulsions ; et la dominance des compulsions ordre / comptage / rangement…)
Cependant, tous les TOC ne sont pas homogènes et le clinicien doit tenir compte des cas Particuliers :
Enfin, les cas TOC qui sont paradoxalement aggravés par les antidépresseurs. Certains facteurs sont prédictifs de cette situation particulière où le traitement anti-TOC est capable d’induire une aggravation paradoxale du TOC :
Voici un récent témoignage
« Souffrant de TOCs de propreté et de vérification, un traitement mʼavait été prescrit avec de lʼEffexor 75 mg (1 gélule le matin) et de lʼAbilify 15 mg (1 comprimé le matin). Il nʼy a pas eu dʼamélioration, et je ne me sentais pas bien du tout moralement. De plus, mes mains tremblaient. En regardant une émission de télévision "Obsession...sur la voie de la guérison", diffusée sur TF1 en février 2011, jʼy ai vu VT, psychologue spécialiste des thérapies cognitives et comportementales au CTAH à Paris. Jʼai donc cherché ses coordonnées sur internet et pris rendez-vous pour le mois de mars de la même année.
Mon traitement a été modifié, en me prescrivant toujours lʼEffexor 75 mg (1 gélule le matin), et réduisant considérablement le dosage dʼAbilify (2,5 mg, soit 1/2 comprimé de 5 mg le matin), mais ajout du Téralithe 400 mg (1/2 comprimé le matin).
Depuis, je vais beaucoup mieux. Les TOCs ont nettement diminué. Je suis plus calme, détendue, et plus du tout oppressée comme avant. Mes mains ne tremblent non plus. Six mois après le début de ce nouveau traitement, jʼai même trouvé un petit travail qui me plaît beaucoup. »
Ce témoignage illustre les cas de TOC qui résistent aux AD et qui manifestent sous AD un état d’excitation psychique. Ce qui indique le recours aux doses les plus basses de l’AD (jamais l’arrêter brutalement) en association avec une petite dose de lithium. Par ailleurs, l’ajout d’un antipsychotique atypique comme Abilify ne doit jamais être fait avec des doses fortes (p ex 15 mg dans ce cas). Le blocage dopaminergique est souvent mal toléré par les patients (qui souvent sont en état de faible activité dopaminergique) ; donc une petite dose de 2,5 mg est suffisante pour agir sur le TOC ou la dépression bipolaire mixte.
En conclusion, un « bon » traitement du TOC doit être toujours guidé par une évaluation clinique initiale la plus complète possible – une évaluation qui tient compte des configurations cliniques complexes et variées du TOC ainsi que la comorbidité, notamment la cyclothymie.
J’insiste sur ce point car la majorité des questions après ma conférence concernait le « bilan clinique » avec des témoignages attestant la carence de cette étape avant les prescriptions des ISRSs.
De plus, le traitement médicamenteux doit être complémentaire et intégré avec l’aide psychologique. L’idéal c’est d’obtenir la meilleure synergie entre les médicaments et la thérapie cognitive comportementale, notamment agir sur les dimensions qui peuvent bloquer les bénéfices de la TCC (anxiété sévère, nombre élevé des OC, dépression majeure, instabilité émotionnelle, crises de colère, lenteur, tics complexes…). Dans le sens inverse, une bonne TCC permet de réduire au maximum les doses du traitement et peut garantir un moindre risque de rechute avec la réduction ou l’arrêt du traitement psychotrope.